Chronique

Théo Ceccaldi Trio

Carrousel

Théo Ceccaldi (vln), Valentin Ceccaldi (cello), Guillaume Aknine (g)

Label / Distribution : Ayler Records/Orkhestra

Publier un premier disque chez Ayler Records avec le soutien d’une figure comme Joëlle Léandre est, pour une jeune formation, un beau signe de reconnaissance. En signant d’élogieuses notes de pochettes pour Carrousel, l’album du trio du violoniste Théo Ceccaldi, la contrebassiste souligne avec justesse la maturité de ce petit orchestre de chambre inventif et iconoclaste. Avant tout, c’est la formation qui surprend ; si le trio à cordes n’est pas très courant en jazz, il est a fortiori rare qu’une guitare électrique s’immisce entre le violon et le violoncelle comme on s’impose dans une affaire de famille… On ne saurait mieux dire, d’ailleurs, puisque c’est Valentin Ceccaldi, frère du violoniste qui tient le violoncelle ! Déjà remarqué dans des formations comme Marcel et Solange ou Walabix, c’est aussi un pilier du Tricollectif, bouillonnant creuset orléanais enclin aux surprises.

Constitué de ces cordes inédites, le trio pourrait paraître bancal. Il se révèle au contraire plein de ressources. Très égalitaire et reposant sur la prise de risques collective, il sait échanger les rôles pour faire varier les couleurs comme les dialogues privilégiés. Ainsi, dans « Excusez-moi », le morceau inaugural, le timbre sec du guitariste Guillaume Aknine ancre une rythmique incisive au cœur d’un dialogue de cordes frottées qui témoigne d’une influence contemporaine évidente. A l’inverse, le jouissif « Blouse Blanche et Blouson Noir » offre à Valentin Ceccaldi l’occasion d’imposer une ligne de basse digne d’un rock de contrebande. Son groove jubilatoire laisse la place à une joute pleine d’humour où son violoniste de frère porte le fer face à la guitare. Si Théo signe la plupart des morceaux, Valentin s’illustre avec « Cocube », petit bijou d’écriture. C’est avec plaisir qu’on y retrouve l’atmosphère très onirique du disque de Marcel et Solange, dont il était l’un des principaux animateurs.

Dans cette approche très écrite, on sent une volonté ardente de mener les débats au cœur du groove, volonté liée à un plaisir évident de jouer sur les codes du jazz. « Le Crapaud » résonne des pizzicati du violoncelle comme du bel échange entre Aknine et le violon. S’il est en effet question de Carrousel, c’est que les musiciens évoluent dans un univers coloré qui passe d’un langage à l’autre sans tourner en rond. Dans les improvisations plus collectives (très intéressant « Melenchology »), le trio se croise sur des chemins versatiles, citant notamment « Norwegian Wood » des Beatles au milieu des textures alambiquées du violon. Nourri à toutes sortes de musiques, le Théo Ceccaldi trio s’amuse de leurs influences avec l’effronterie de la jeunesse. Un revigorant tour de manège…