Chronique

Tijn Wybenga & AM.OK

Brainteaser / Live at Bimhuis

Label / Distribution : Zennez Records

Tijn Wybenga est un jeune compositeur et chef d’orchestre néerlandais, établi à Amsterdam. Il a été artiste associé à la scène du Bimhuis, le fameux lieu de production du jazz et des musiques improvisées de la ville. Le but était de mettre en avant la scène néerlandaise du jazz pour le 21e siècle, rien de moins.
En montant son orchestre AM.OK (Amesterdam Moderne Orchestra), il rassemble un ensemble hétéroclite de musicien.ne.s formé.e.s au Conservatoire notamment, ainsi qu’une très large palette de sons et d’influences.
En basant son écriture sur un savant dosage de jazz, de musique orchestrale, de rythmiques syncopées, de break hip-hop, de mélanges acoustique et électronique, Tijn Wybenga propose une musique originale et très colorée. Avec quatre vents, quatre cordes, cinq instruments rythmiques (sans piano ni clavier) et un designer électronique, l’orchestre constitué est à la lisière des genres pop symphonique, ou même production de hip-hop, voire musiques de film.

Les enregistrements des deux disques produits par ZenneZ Records et Bimhuis en témoignent. Sur le Live at Bimhuis, le long titre « Volga » est prétexte à citer le titre russe « Plaine, ma plaine » sous toutes les coutures, comme un mantra, dans une ambiance changeante où les cordes glissent sur le fil entre tension hitchcockienne et cavalcade spectrale. À chaque instant, les musicien.ne.s prennent quelques courts soli, comme on sort la tête de l’eau pour respirer, avant de replonger dans la masse collective.
Sur Brainteaser, enregistré plus récemment, la recette est la même, mais avec plus d’effets et de construction. Notamment en utilisant des samples d’enregistrements d’improvisations des musicien.ne.s de l’orchestre et en les réinjectant en temps réel dans la musique, comme une sorte de booster vaccinal.
Cette mise en perspective suit la trame compositionnelle et confirme la signature moderne, ouverte et inventive de son auteur Tijn Wybenga. Son appétence pour les cordes, avec une écriture très rythmique qui déstructure l’ordre habituel du quatuor et sa hiérarchie instrumentale, et son plaisir évident d’introduire par l’électronique des chausses-trappes dans la narration, font de cette musique un voyage plein de surprises, dont certaines apparaissent subitement à la troisième ou quatrième écoute, comme si elles étaient restées tapies dans l’ombre !
Un tel orchestre, soutenu par une institution comme le Bimhuis, est une chance pour quiconque vit de musiques et d’aventures. C’est aussi une très belle vitrine pour la création amstellodamoise d’aujourd’hui, dont on reparlera bientôt lors d’un dossier consacré à la scène batave.
On peut se procurer facilement les deux vinyles sur le bandcamp du chef d’orchestre et compositeur (cf ci-dessous).

par Matthieu Jouan // Publié le 20 février 2022
P.-S. :

Alistair Payne trompette, Kika Sprangers saxophone alto, Federico Calcagno clarinette basse, Odei Al Magut trombone, Pablo Rodriguez violon, Yanna Pelser et George Dumitriu alto, Pau Sola violoncelle, Teis Semey guitare, Felix Back claviers, Tom Pritchard vibraphone, Alessandro Fongaro basse, Jamie Peet batterie, Angelo Boltini live electronics, Tijn Wybenga chef d’orchestre.