Chronique

Baeshi Bang

Old School K-Pop Revisited

Etienne de la Sayette (ts, fl,cla) Victor Michaud (fh,cla), François Chesnel (p), Giani Caserotto (g), Stefano Luchini (dms)

Label / Distribution : Autoproduction

Lorsqu’on parle de musique populaire coréenne, on songe aux canons de la K-pop et ses danses aussi millimétrées que ses brushings, où des sourires étincelants masquent tant bien que mal une mélodie insane. Comme il est stupide de réduire la culture d’un pays à ce qu’il exporte de plus consensuel, comme si la variété française se limitait à Zaz et David Guetta, il est nécessaire de se pencher sur le travail réalisé par le saxophoniste Etienne de la Sayette au sein de son groupe Baeshi Bang, qui ressuscite les chansons de Bae Ho, fameux chanteur des années 60, époque de la reconstruction et de l’occidentalisation du 38ème parallèle.

C’est une plongée dans cette décennie que nous propose ce musicien habitué de la sono mondiale avec son fameux groupe Akalé Wubé, qui explore la musique éthiopienne. Le disque est court, à peine deux faces de maxi 45 tours, mais présente un univers insouciant qui nage entre deux cultures, à l’image de ce que vivait le chanteur coréen lorsqu’il habitait le rhythm’n’blues appuyé de « Téyangé Jopion ». Ici, le piano de François Chesnel et la guitare de Giani Caserotto soulignent les différents claviers électroniques de Victor Michaud, qui font songer à l’atmosphère de certains morceaux du Sacre du Tympan. La raison en est simple. Star du cinéma coréen, Bae Ho chantait des chansons au fort potentiel cinématique.

On se surprend, à l’écoute du magnifique « Hwanpo Todté », à déceler au milieu de l’atmosphère asiatique quelques survivances de rythmiques éthio-jazz dans le ténor de La Sayette et la batterie lourde de Stefano Lucchini. Plus globalement, ce disque - qui fera le bonheur des chercheurs de pépites - interroge les prémices de l’influence de la pop music globale sur les traditions populaires non occidentales, que ce soit en Inde, en Éthiopie, en Égypte ou, donc, en Corée. On aurait tort de le ranger dès lors dans la case du divertissement exotique. La douceur mélancolique d’un morceau comme « Chot Kil » (qui signifie « Un chemin dans la nuit ») vaut bien mieux que cela. Reste à souhaiter que ce court voyage en annonce de plus longs.