C’est à la tête d’un big band que Toufic Farroukh déroule une musique dont une des caractéristiques fondamentales est le mélange. La lecture du line-up est explicite, où se mêlent des instruments typiques du jazz, à commencer par le saxophone de Toufic Farroukh, d’autres, caractéristiques de la musique classique européenne, et des percussions orientales – le bendir, la darbouka, le req dans les mains d’Ali Khatib et de Walid Baba Nasser. Ajoutons, sur deux morceaux, la participation de la guitare de Nelson Veras et on aura un aperçu du programme.
Reste qu’en mélangeant des ingrédients aussi divers, le risque est d’avoir une pâte mollassonne. Car il en est de la musique comme de la cuisine : l’alchimie doit s’opérer. C’est le cas ici. Il n’y a pas – et c’est fort heureux – superposition de couches hermétiques les unes aux autres, pas plus qu’un conglomérat d’éléments disparates. Tout est fait de pointes, de pincées de ci ou de ça. On dira d’un morceau qu’il est orientalisant mais on remarque tout aussi vite que ce n’est pas aussi évident ; une autre fois, à l’instar de « Caer Ahwak », c’est une tendance latine qui perce – la guitare de Nelson Veras et la voix de Roberto Garcia y contribuent bien entendu – mais rien n’est aussi manichéen, et les arrangements nous rappellent que Toufic Farroukh a le chic pour composer en sucré-salé.