Entretien

Andy Emler part en live

Andy Emler présente un nouveau disque de son MegaOctet enregistré en public.

Andy Emler, photo Christophe Charpenel

Ce concert parvient à retranscrire la vitalité d’un groupe qui n’est jamais aussi à l’aise que sur scène. Et puisque cette sortie est une première en trente années d’existence, allons poser quelques questions au principal intéressé pour parler scène, Zappa, Woodstock, accent du Sud-ouest et privilèges.

Le MegaOctet à Nevers, photo Christophe Charpenel

- Après des années d’existence et une discographie impeccable, pourquoi un live du MegaOctet ?

Dans certaines pratiques musicales où la « prise de risque » est de rigueur, à savoir l’inattendu, l’improvisé, un son inspirant, une autre route que celle prévue, il se passe forcément des moments magiques (ou… tragiques) pour le leader du groupe quand il y en a un.

Donc un « arrêt sur image » d’un concert sur disque peut être un témoignage des plus passionnants pour les passionnés (Encore faut-il qu’il y en ait… Ha, c’est vous !!!).

- Ce concert a été enregistré quand ?

Le 11 novembre 2019 au Nevers Jazz Festival. Le concert du MegaOctet a été un de ces moments magiques. Tous les membres de ce « petit combo » ont brillé, de même que les trois invités Thomas de Pourquery, Médéric Collignon et Nguyen Lê.

Il se trouve que le concert a été filmé et enregistré. Pourtant, dans un premier temps, il n’y avait aucunement l’intention de publier un disque. C’est là que Vincent Mahey (assisté d’Arthur Gouret) a décidé de travailler sur le mixage de certaines pièces. (Accent Sud-ouest) : « et là j’ai entendu de trrrès belles choses avèque des improvisateurs inspirés par c’te musique et une rythmique au meilleurrree de sa forme. A’mendonné, il faut revenir aux fon-da-men-taux ».

Et comme Vincent Mahey remonte son label Pee We, eh bien, c’est parti ! Voici l’album : MegaOctet Live à Nevers Jazz : « Just a beginning » .

- Avez-vous été directement ou indirectement inspiré par des grands lives enregistrés ?

D’une certaine manière oui ! Un autre passionné, du nom de Michel Orier [1] m’avait commandé en 1995, pour le Festival Musique de Jazz et d’Ailleurs, un concert Zappa avec le MegaOctet. J’ai relevé d’oreille toute la musique de Live : Zappa in New York » puisque les partitions n’existaient pas. Ouhaaaaaaa, le boulot !!!!!!

Avec le MegaOctet on peut sentir une similitude avec la démarche de Zappa et bien d’autres : à savoir l’apparente décontraction d’un orchestre virtuose sur une musique savante et difficile, laissant des plages aux solistes de haut vol, tout en voyageant dans les styles avec l’humour en fil rouge. Il y a une trame écrite, un squelette décidé auparavant puis, ensuite, les moments d’improvisation.

Dans nos concerts, j’aime aussi qu’on trouve l’énergie du rock qu’on entend dans nos/mes influences qui vont des Rolling Stones à Led Zeppelin, des Who à Deep Purple (le Live in Japan notamment) où les mecs se lâchent dans des longs solos comme John Lord à l’orgue, ou encore, Alvin Lee et son solo historique sur « I’m Going Home » à Woodstock avec le groupe Ten years after… Quel voyage là encore ! Les gars sont d’excellent instrumentistes à la technique virtuose, parfois époustouflante, comme la plupart des jazzmen d’aujourd’hui.

On retrouve dans « Just a Beginning » cette technicité au service d’une impro qui prend le temps de vivre et d’être au service de la musique. Nguyen Lê dans « Just a Beginning », Thomas de Pourquery dans « E Total » ou Médéric dans « Les Ions sauvages » en sont un bon exemple.

- Finalement, pourquoi c’est si bien, un concert ?

Le concert est le moment de vie intense de la musique et des musiciens. Le choc du son et la réaction d’un public sont instantanés, l’échange émotionnel est immédiat (quand un peintre doit exposer avant de ressentir la réaction du public, et un écrivant doit être édité avant d’être lu). L’échange entre le public et le groupe sur scène est un moment très, très privilégié. 
Alors pourquoi ne pas le matérialiser avec un disque ?!
En ce qui nous concerne c’est une première en trente ans de loyaux services. Et ce n’était pas planifié, pour une fois. Hope you enjoy. 

par Nicolas Dourlhès // Publié le 24 octobre 2021
P.-S. :

[1Directeur de la Maison de la Culture d’Amiens dans les années 90.