Chronique

Chet Baker, Jack Sheldon

In Perfect Harmony : The Lost Album

Chet Baker (tp, voc), Jack Sheldon (tp, voc), Jack Marshall (g), Dave Frishberg (p), Joe Mondragon (b), Nick Ceroli (dm)

Label / Distribution : Jazz Detective

1972 : deux bad boys du jazz West-Coast en goguette, errant de club en club en Californie, s’arrêtent un jour au studio United Audio à Tusin pour graver leur compagnonnage. L’alliance entre l’ange maudit du jazz Chet Baker et son compère Jack Sheldon, lui aussi trompettiste et chanteur, bopper accompli mais ayant décidé de faire bouillir la marmite en s’adonnant à la profession d’humoriste et de musicien pour la radio et la télévision, n’allait pas vraiment de soi selon les canons du show-business. Dizzy Gillespie lui-même avait loué la qualité du jeu de Sheldon et sa voix très « mâle » faisait des ravages sur le petit écran. Chet, lui, commençait juste à récupérer sa bouche fracassée six ans plus tôt par des dealers, et continuait, la quarantaine passée, à chanter avec sa voix d’ado qui vient de muer, tout en faisant des miracles avec sa trompette douce-amère. Les standards s’enchaînent avec une élégance sous le signe du cool, sur lequel plane l’ombre de l’usage intensif des narcotiques (Sheldon s’en sortira et décèdera en 2019… on sait que le destin de Chet fut autre), sans jamais se départir d’une exigence musicale imparable. La rythmique, comme il se doit, est d’une efficience rare. Pour notre plus grand plaisir, Jazz Detective a mené l’enquête.