Chronique

Duo Machado/Liebman

Caminando

Jean-Marie Machado (p, comp, arr), David Liebman (ss)

Label / Distribution : PAO RECORDS

On ne pouvait espérer mieux de la rencontre inattendue entre Jean-Marie Machado et Dave Liebman. Ces deux grands compositeurs mais aussi improvisateurs de renommée mondiale se sont retrouvés en 2003 pour créer ce duo qui s’inscrit dans la continuité des projets actuels du pianiste (Sextet Andaloucia, Trio Time…). On savait aussi Dave Liebman attaché au piano [1]. comme le pouvent ses collaborations avec Joachim Kühn, Bobo Stenson, Richie Beirach ou, plus récemment, avec Marc Copland. On
se rappellera aussi que Machado s’est forgé une expérience bien rodée du duo avec saxophone au côté de Jean-Marc Padovani et d’Andy Sheppard, chaque projet étant l’occasion de dévoiler des inspirations musicales toujours plus convaincantes.

Le répertoire concocté par Machado reste dans la lignée de ses références actuelles, avec des compositions brillantes et des variations splendides sur le fado et le flamenco, sorte d’hommage mérité à la musique portugaise. Citons les arrangements de « Solidao », « Nao quero amar » ou « Lisboa nao sejas francesa » sur des thèmes de compositeurs aussi célèbres que Ferreira ou Galhardo. Ses compositions personnelles respectent les formes chaleureuses et dansantes du fado portugais d’Amalia Rodriguez mais aussi des ballades (« Rumba yava », « Petite source » et « Caminando con tus Ojos verdes »). L’exploration du registre entier du piano et du soprano renforce le caractère évasif et profond des univers traversés, notamment sur « Mésange Bleue » et « Un Niño en la Calle ».

Les deux interprètes prouvent encore ici leur talent, tant dans l’interprétation des mélodies entraînantes que dans le lyrisme de leur propos sans cesse renouvelé. Un véritable dialogue intime se noue peu à peu, qui rehausse la beauté des timbres et nuances - toujours fidèles. Égal à lui-même, c’est-à-dire unique, Liebman démontre que le lien entre technicité et liberté est naturel. Le piano renvoie à merveille ses sonorités sensuelles au soprano pour les réinventer et les amplifier. Soulignons également la talentueuse prise de son de Jacques Laville qui fait de ce disque une œuvre au charme irrésistible. Toujours aussi personnel et exigeant, Jean-Marie Machado prouve une fois de plus dans ce duo chaleureux qu’il est une des personnalités les plus marquantes du jazz européen.

par Armel Bloch // Publié le 29 mai 2008

[1qu’il aime même pratiquer lors de certains concerts