Chronique

Eric Watson

Midnight Torsion

Eric Watson (p), Régis Huby (vln), Claude Tchamitchian (b), Elise Caron (voc)

Label / Distribution : Emouvance

Avec Midnight Torsion, le pianiste Eric Watson signe une œuvre magistrale autour du Corbeau d’Edgar Allan Poe dans ses deux traductions signées Mallarmé et Baudelaire.

La musique de chambre jouée ici est traversée d’une tension perpétuelle et d’une noire intensité. Loin de souligner le texte de l’auteur, la puissance des compositions le nimbe d’un clair-obscur qui nourrit l’angoisse, la tristesse et le mystère de l’œuvre. Le jeu volubile et enflammé de Régis Huby passe de la douceur à la stridence au gré des émotions du poète dans ce monde de la nuit, tandis que la contrebasse de Claude Tchamitchian renforce la présence des ténèbres pour un voyage hors du temps et du réel ; sa pulsation terrible et magnifique achève d’emporter l’auditeur. En maître de cérémonie, Watson semble arpenter la chambre de Poe en éprouvant tour à tour tous ses sentiments en une déambulation hallucinée au pays de l’absence et des délires qu’elle engendre. Et que dire de la performance d’Élise Caron, qui transcende le texte en lui donnant corps et âme au plus juste ?

Face à la difficulté de mettre en musique pareil poème, le niveau de création atteint ici est tout exceptionnel. On en ressort transporté, littéralement emporté par le texte et la musique qui se mêlent dans cette incroyable nuit musicale et poétique.