Chronique

Christophe Girard

Space, time and miror, live à l’Espace des Arts

Christophe Girard (accordéon), Amaryllis Billet (vl, vx), Elodie Pasquier (cl), Anthony Caillet (euphonium), Claude Tchamitchian (cb), François Merville (dms)

Repéré dans la formation Mélusine ou encore dans la Campagnie des Musiques à Ouïr, l’accordéoniste Christophe Girard est vraisemblablement à l’orée d’un parcours d’instrumentiste recherché comme de celui de compositeur reconnu. Cette nouvelle proposition en sextet coche, de fait, nombre de cases d’un répertoire réussi. Le casting assemblé prouve déjà sa capacité à s’entourer de personnalités aptes à illustrer ses objectifs esthétiques. Que ce soit le fidèle Anthony Caillet avec qui il travaille depuis longtemps (notamment dans le duo Smoking Mouse ou Melusine), ou encore Amaryllis Billet au violon et à la voix (qu’on a, elle, pu entendre dans l’Ensemble Op. Cit. ou Fenêtre Ovale), ils sont une belle découverte et rendent compte d’une musique qui oscille sans jamais trancher entre une écriture élégante et un jazz contemporain dans lequel l’immédiateté et la tonicité sont de mise.

En cela d’ailleurs, la présence de la clarinettiste Élodie Pasquier ajoute un supplément de couleur à un orchestre chambriste, ouvert pourtant aux quatre vents. Ses interventions solistes sont l’occasion de rendre compte de son jeu complet et extraverti, quand elle ne se fond pas intelligemment dans le collectif. Une section rythmique majuscule, enfin, achève de compléter cette formation et lui donne sa dynamique. Claude Tchamitchian à la contrebasse se fait robuste et porte la charpente de l’ensemble. Capable d’appuyer sur des lignes structurantes, il se fend de traits rapides ou d’un solo magnifique. Au plus près de lui, son compagnon François Merville assure une rythmique mouvante et volontiers frappeuse quand le besoin s’en fait sentir. Son jeu spatialisé et varié est une des données du propos de Girard.

En trois longs tableaux (et une introduction), le sextet joue en effet de l’espace, comme son nom l’indique. Il prend le temps de dérouler une narration longue dont le lyrisme gagne en amplitude, tout en libérant au passage des contrepoints qui réactivent l’avancée. La musicalité gagne sans cesse en densité et ouvre des territoires vierges que les solistes peuvent investir. Avec finesse, ils redéfinissent le propos de départ, le transcendent par leur imaginaire et lui donnent une puissance nouvelle lorsqu’ils pénètrent à nouveau le son collectif. Une force élégiaque gagne alors en émotion et on sort comme lavé de cette musique de belle facture qui accompagne l’auditeur et lui chante une poésie éphémère mais volontaire dont le souvenir, lui, reste durable.