Chronique

Favata - Elizondo - Peghin

Mystic Geography

Enzo Favata (ss, bcl, chalumeau), Luciana Elizondo (voc, viole de g), Marcello Peghin (g, b), Anaïs Drago (vln).

Label / Distribution : Losen Records

Enzo Favata ne cesse de se plonger dans les racines de la musique : sa propension à explorer des thèmes archaïques l’a conduit à composer de façon originale tout en se forgeant une véritable identité. Sa parfaite connaissance de la musique folklorique sarde s’est construite en complémentarité de ses explorations sonores contemporaines. Ses collaborations fructueuses avec Enrico Rava, l’Art Ensemble of Chicago ou Anja Lechner ont enrichi son langage musical. Os Caminhos de Garibaldi, fruit d’un labeur entrepris en 2011 et publié en début d’année 2024, affichait un contraste entre la section de cuivres et la rythmique incisive. Le changement de climat qui s’opère dans Mystic Geography recentre la musique sur un volet émotionnel. Enzo Favata se livre ici à un exercice intimiste.

« Il bianco e dolce cigno », madrigal composé en 1539 par Jacques Arcadelt, sublime l’apesanteur contemplative, la musique est mise à nu. Composé par Marcello Peghin, « Ora pro nobis » développe une atmosphère partagée entre les arpèges de la guitare et l’expressivité d’Enzo Favata au saxophone soprano, non loin des ambiances nordiques de John Surman. On retrouve ce climat éthéré dans « Sailors And Whales », inspiré des anciennes légendes de la mer du Nord, parsemé d’échos de guitare et de la sobriété de la viole de gambe de Luciana Elizondo. Tombé en désuétude et redécouverte avec le renouveau de la musique baroque au XXe siècle, cet instrument marie parfaitement sa voix à celle de la guitare électrique. Avec l’apport des sonorités électroniques filtrées, « Flight From The City », composé par Johan Johanson donne l’occasion à la clarinette basse d’Enzo Favata de se promener sur les résonances mélodiques inspirées d’Anaïs Drago, invitée sur ce morceau.

La voix suave de Luciana Elizondo irradie « Une jeune fillette », daté de 1600, redécouvert dans le film d’Alain Corneau Tous les matins du Monde et « Algarrobo Algarrobal », composé par la pianiste argentine Lia Cimaglia Espinosa. Plus énergique, « La Virgen » donne l’occasion à Marcello Peghin d’improviser à la guitare électrique avec une sonorité proche des phrasés caractéristiques de Mike Oldfield.

Enzo Favata a concrétisé un voyage empreint de mysticisme, les séquences cosmiques et le chant méditatif de cet album procurent un sentiment de paix intérieure, les mélomanes apprécieront.