Chronique

The J. & F. Band

Star Motel - An American Music Experience

Jaimoe (d, perc), Joe Fonda (b, voc), Tiziano Tononi (dm, perc), Paolo Durante (p, keyb), David Grissom (g), Jon Irabagon (ts), Emanuele Parrini (vln), Bobby Lee Rodgers (g, voc), Craig Green (g)

Label / Distribution : Long Song Records

Au sein du continent nord américain, la propagation du rock, du jazz, de la soul, du funk, de la country a forgé des identités culturelles extrêmement diversifiées, bien souvent étrangères les unes aux autres. Les différents courants musicaux qui traversent Star Motel - An American Music Experience ont un point commun, un réel refus d’embourgeoisement, les musiques proviennent de diverses contrées et elles combattent ici toute forme de respectabilité. L’union expérimentale entre les musiciens, qui enregistrent ce quatrième album au studio Firehouse 12 à New Heaven dans le Connecticut, fonctionne impeccablement.

Ce double album lorgne vers des atmosphères torrides, en particulier dans le premier disque intitulé Songs, le guitariste Bobby Lee Rodgers se taille la part du lion avec ses compositions énergiques « Star Motel », « Formula One » et « Lighthouse ». La Route 66, les montagnes Rocheuses, les Appalaches et les déserts inhospitaliers défilent au gré des notes âpres déversées par le groupe qui s’éloigne de toute joliesse et privilégie un retour aux sources de la musique américaine. Écrit par Toy Caldwell, « Take The Highway » en est l’exemple parfait, des réminiscences du Marshall Tucker Band y transparaissent. L’arrangement contemporain de ce morceau, signé par Tiziano Tononi se révèle être la marque de fabrique de cette formation. La capacité qui vise à redonner un souffle nouveau à ces compositions apporte une approche multidirectionnelle où Jon Irabagon se livre sans cesse à des prouesses au saxophone ténor, il apparait à la fois insolite et lyrique. Le batteur Jai Johanny Johanson alias Jaimoe, membre fondateur de l’Allman Brothers Band en est aujourd’hui le seul survivant. Son style de jeu, nourrit par ses expériences avec Otis Redding et le rock sudiste n’oublie pas de swinguer encore et toujours, le jazz l’a toujours inspiré.

Le deuxième disque dénommé Instrumentals est largement consacré à un long medley dédié à Charles Mingus, il bénéficie d’arrangements subtils de la part de Tiziano Tononi, passionné par l’œuvre musicale du contrebassiste. Il en résulte une puissante évocation où le violoniste Emanuele Parrini fait des miracles, partagé entre le jeu flexible de Don « Sugarcane » Harris et des sonorités fortement abstraites, il embrase la musique. La grande pièce solennelle, « The Rez : Active Resistence ! » se réfère aux terres d’où les Amérindiens ont été expulsés par le gouvernement américain, la construction orchestrale de la formation y est imposante.

L’originalité qui se dégage de Star Motel - An American Music Experience incorpore tout un pan de l’histoire de l’Amérique du Nord. Les interactions entre des musiques au préalable dissemblables se révèlent ici particulièrement abouties et créatives, l’essence intemporelle du blues en demeure le moteur..

par Mario Borroni // Publié le 22 septembre 2024
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