Hugh Coltman
Son dernier album Shadows est un hommage à Nat King Cole mais pas seulement…
Photo © Pascal Codron
Depuis sa participation à l’album d’Eric Legnini The Vox il a pris davantage conscience de sa voix et se montre beaucoup plus sûr de lui. Tout cela se retrouve sur scène, où il se comporte en leader lorsqu’il interprète ses morceaux, et lorsqu’il se lâche enfin comme sideman.
Comment êtes-vous venu à la musique et au chant ?
Par ma mère, qui était poète mais n’a publié qu’un seul livre - elle a eu des enfants… Elle nous a toujours orientés, mon frère et moi, vers la musique. J’ai fait de la danse quand j’avais cinq ans, mais je crois que ce n’était pas très beau à voir (rires). Gamin, j’ai chanté Oliver Twist et trouvé ça assez chouette. J’aimais bien les sensations que cela me procurait. Pendant mes études de théâtre à Bath, mes potes du village, où tout le monde faisait aussi de la moto, m’ont dit « Tiens ! On monte un groupe ». C’était Hoax. Il existe toujours.
- Vous avez donc débuté par le blues rock. Le nom a été choisi comment ?
Un peu comme un canular. On faisait de la musique un peu « old school », réservée aux mecs de Chicago ou du Texas comme The Fabulous Thunderbirds, alors qu’on était quatre petits gars dans un village d’Angleterre. On trouvait ça assez drôle…
- J’ai lu que aviez rencontré trois grosses pointures : BB King, Buddy Guy et John Lee Hooker ?
Pour John Lee Hooker ce n’est pas vrai, malheureusement ; mais j’aurais bien aimé. Avec Buddy, en revanche, c’était super ; on a fait ses premières parties pendant plus d’un mois et demi. Un grand, grand apprentissage car à l’époque j’avais 23 balais. C’était super, comme avec BB King, dont on a aussi assuré quelques premières parties. On l’a rencontré et c’était chouette. Un gentleman ! Tout comme pour Buddy, avec qui on a joué plus de trente dates. A la fin il nous a invités dans sa loge et on a pu discuter.
- Vous alternez parcours en solo et en groupe.
Pour le solo, c’est moi qui vais écrire les chansons, mais nous sommes toujours en groupe. Le batteur de ce soir a fait la première tournée de Hoax. Quand j’ai envie de faire quelque chose, c’est la meilleure solution.
- Hugh Coltman & Thomas Bramerie / Nice Jazz Festival 2015 © Philippe Déjardin
- Sur Sing Twice d’Eric Legnini, vous étiez la seule voix masculine ; c’est Krystle Warren qui vous a présentés.
C’est comme ça que ça a commencé. J’avais écouté pas mal de jazz mais jamais osé en chanter ou me présenter comme chanteur de jazz. Ce que je ne fais d’ailleurs pas non plus aujourd’hui, même si je chante sur un album qu’on classe comme du jazz parce qu’il s’agit de Nat King Cole. Mais si on écoute les arrangements, ce n’est pas si jazz que ça. Quand j’ai commencé à bosser avec Eric, je me suis dit que chanter dans ce registre c’était très cool. Il y avait tellement plus d’espace, de liberté et d’échanges ! Sur l’album il y avait des chansons pour lesquelles on n’avait pas la fin. Du coup on a joué jusqu’à ce qu’on n’en puisse plus.
- Il y avait aussi la peur de se glisser dans les pas de Krystle ?
Très, très grande chanteuse que j’apprécie vraiment. Reprendre après The Vox, derrière elle, sur un album pour lequel Eric avait eu une Victoire du Jazz, ce n’était pas rien ! J’avais un peu peur, c’est vrai. Après trois ou quatre dates je me suis dit que si ne m’amusais pas en chantant, ça ne servait à rien que je chante. Alors j’ai commencé à m’amuser et Eric m’a dit « Voilà, tu as trouvé ta voix. Tu ne fais pas du Krystle comme avant. Maintenant c’est parfait ».
- Comment est né votre dernier album Shadows, Songs of Nat King Cole ?
Ah ! Longue histoire que je vais essayer de résumer. (NDLR. Il doit monter sur la scène du Nice Jazz Festival dans moins de dix minutes et l’organisation nous presse.) Ma mère était très fan de Nat King Cole. Quand j’ai eu envie de reprendre ses chansons, ça m’a amené à m’intéresser à sa vie, son long combat de musicien noir américain dans les années 40-50. Son personnage paraissait lisse, idéal comme Sammy Davis Jr., mais c’était de l’ultra-professionnalisme.
En faisant le dernier morceau de l’album Morning Star, le duo piano-voix avec Gaël [1], qui est là ce soir, je me suis rendu compte que c’était la chanson d’amour d’une mère à son enfant. Je me suis alors dit « Cet album n’est pas un hommage à Nat King Cole mais un hommage à celle qui m’a fait découvrir sa musique, ma mère. » Il salue sa volonté de nous donner le plaisir de la musique. C’est vraiment un disque pour elle.