Chronique

Kawashima-Mochizuki-Henritzi

Chinmoku wa ishikure ni yadoru bouryoku

Makoto Kawashima (as), Harutaka Mochizuki (as), Michel Henritzi (lapsteel guitar, guitar feedback).

Label / Distribution : Trost Records

On connaît assez peu en France les saxophonistes japonais Makoto Kawashima (Saitama, 1981) et Harutaka Mochizuki (Shizuoka, 1977). Issus de la même génération, ils jouent tous deux de l’alto. On connaît en revanche davantage le guitariste, producteur et critique musical Michel Henritzi (Metz, 1959) dont Citizen Jazz s’était fait l’écho du travail il y a quelques années.

Chinmoku wa ishikure ni yadoru bouryoku, sorti chez Trost Records l’année dernière, est donc une bonne occasion de mieux découvrir ces trois musiciens qui évoluent dans une esthétique expérimentale, aux confins du free, de l’improvisation libre et de la noise. La particularité du disque est que la performance de chaque musicien a été enregistrée séparément, dans le courant de l’année 2021. Le tout a été mixé par Kevin Le Quellec peu après.

Le premier morceau, « Taiyo no Maiso », est une longue complainte de plus de vingt minutes où l’on peut entendre les trois musiciens jouer simultanément. Henritzi est à la lap steel guitar et développe un fond sonore permanent et distordu, sorte de bourdonnement erratique qui rythme le morceau. Des deux saxophonistes, on ne sait pas bien qui fait quoi. Ce que l’on entend, en revanche, c’est qu’aucun ne ménage sa peine pour souffler une ambiance apocalyptique faite de sonorités acérées, coupantes comme du verre, de bruits énigmatiques et de sauvages et âpres circonvolutions.

Sur « Tsuki no Kanashimi », seuls Harutaka Mochizuki et Michel Henritzi jouent. Avec sa guitare, Henritzi est à la limite du larsen tout au long du morceau. Mochizuki lui emboîte le pas et s’échine dans d’acides aigus. C’est grinçant et abrupt et ça dure dix minutes.

« Kumo no Hikisaki » clôt le disque. Kawashima est à l’alto. Henritzi à la lap steel. L’ambiance y est plus apaisée, moins hérissée. Le jeu étranglé et éruptif du saxophoniste se noie dans les accords abrasifs et répétitifs du guitariste, instillant une atmosphère sombre et sourde qui pourrait finalement résumer assez bien la musique de l’album.

par Julien Aunos // Publié le 12 novembre 2023
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