Gard Nilssen Acoustic Unity

Après deux derniers albums superbes [1], on attendait avec beaucoup d’impatience la suite des aventures de Gard Nilssen. D’autant que le batteur norvégien avait fait récemment le choix de se recentrer sur sa propre musique en abandonnant certains de ses nombreux projets (dont le chouette groupe Cortex). Elastic Wave, son nouvel album sorti en milieu d’été chez ECM et enregistré au Studio La Buissonne, ne déçoit pas (mais a-t-on déjà été déçu par un disque de Gard Nilssen ?). Toujours accompagné de ses fidèles Petter Eldh et André Roligheten, il est déjà la quatrième étape d’un périple initié il y a bientôt dix ans avec Firehouse, sorti à l’époque chez Clean Feed.

Comme d’habitude, les trois musiciens se partagent l’écriture, ce qui ne nuit pas du tout à l’unité et à la cohérence de l’album, chacun apportant sa propre personnalité au projet. On y trouve des ballades languides (« Altaret », « Lokket til Jon, og skjerfet til Paul », « Cercle 85 », « Til Liv ») dans lesquelles André Roligheten peut laisser libre cours à sa grande sensibilité et à son vibrato si caractéristique, des up tempo échevelés comme « Acoustic Dance Music » ou ce « Boogie » qui pourrait résumer à lui seul l’ADN de ce trio magique : mélodie limpide, interplay et tempo élastique. On peut entendre également des morceaux plus acérés comme « Influx Delight », où Roligheten se fend d’un solo rugissant, ou « The Other Village », où le saxophoniste joue de plusieurs saxophones en même temps (ce qui ne se fait plus guère aujourd’hui), distillant un écho monstrueux, gonflé par le jeu de mailloches de Nilssen. L’album se termine sur le beau « The Room Next To Her » où l’osmose est totale entre la très grande plasticité du jeu de Nilssen, la souplesse féline de Petter Eldh et l’élégance d’André Roligheten, saxophoniste de la ligne claire qui s’attache toujours à rendre très lisibles toutes ses interventions. Avec Elastic Wave, Gard Nilssen met encore dans le mille et déferle encore un peu plus sur la scène jazz européenne.