Chronique

Lagon Nwar

Lagon Nwar

Quentin Biardeau (ts) ; Valentin Ceccaldi (b) ; Ann O’Aro (voc) ; Marcel Balboné (perc)

Label / Distribution : Airfono

Quelques notes de basse fouettant l’air imposent un son grave, épais, majestueux. Un chant hanté, lourd de présences anciennes et multiples, emplit l’espace. Nous voilà dès les premières secondes du disque happés dans les profondeurs. En un lieu où les eaux venues d’ailleurs et de partout se mêlent.

Un lieu d’où surgissent des mémoires chargées de colères, de blessures qui ne se ferment pas mais qui fusionnent en un bouillonnement de volonté et de création.

Ce lieu, c’est le Lagon Nwar.
Où s’agitent en musique les libertés chèrement acquises. Où on n’est pas là pour s’interdire quoi que ce soit. Surtout pas la joie vivace des mélanges impurs chantés. Métissages assumés, langues mêlées (français, créole, bissa, mooré) roulent et s’interpellent comme des vagues contraires.

Autour du lagon, quatre voix se répondent : Quentin Biardeau, aux saxophone et synthé, Valentin Ceccaldi, basse électrique faisant lame de fond (les deux fondateurs du Tricollectif), rejoints par le percussionniste et chanteur burkinabé Marcel Balboné et la chanteuse réunionnaise Ann O’Aro, à la voix semblant venir à la fois du ciel et des tréfonds.

Par certains aspects, cette musique évoque les riches heures du label Crammed Discs, quand, au début des années quatre-vingts, la new wave froide et métallique allait se frotter à d’autres continents, à d’autres pulsations. Même goût du risque, même désir d’alliages improbables, même liberté.

Un disque qui est multitude, à la beauté à la fois sombre et riche en couleurs, fort de ses paradoxes et qui laissera probablement une empreinte durable sur beaucoup d’auditeurs.

par Aymeric Morillon // Publié le 12 octobre 2025
P.-S. :