Misanthrope Trio
Gut Liver
Luis Lopes (g), Gonçalo Almeida (b), Philipp Ernsting (dm).
Label / Distribution : Cylinder Recordings
Misanthrope réunit le Portugais Luis Lopes à la guitare électrique et la rythmique du trio jazzcore Albatre (le Hollandais Philippe Ernsting à la batterie et le Portugais Gonçalo Almeida à la basse) pour deux longues plages improvisées de 37 et 21 minutes chacune, dont la longueur permet d’entrer en profondeur dans les couleurs sombres de cette formation d’occasion.
À partir d’une musique effectivement noire, dark pour tout dire, la capacité du trio à relancer constamment avec beaucoup de volontarisme pour monter dans les excès ne peut que laisser l’auditeur pantois. La guitare de Lopes développe un discours mâché et s’installe dans les aigus avec obstination. Il en tire des sonorités déchirées flirtant à certains moments avec l’électronique, déjouant l’ennui par une saturation du discours qui évite les temps creux. Il s’appuie en cela sur le tapis rythmique parfaitement cabossé d’une batterie omniprésente, aussi puissante que formant un bloc solide avec une basse au son sale. Les deux partenaires pourraient presque se satisfaire d’eux-mêmes, d’ailleurs, tant l’énergie qu’ils génèrent emporte tout sur leur passage.
Rejoignant sur la seconde partie des climats moins chaotiques, le trio reste toutefois dans les couleurs propices à des ambiances sombres qu’il prend le temps de malaxer longuement. En déroulant les contours d’un monde épais et sans joliesse, Misanthrope participe à ces musiques des marges dont la frontalité n’emportera pas l’adhésion de la majorité, mais fera le suc d’une minorité avide de sensations fortes.