Chronique

The Attic

Love Ghosts

Rodrigo Amado (ts), Gonçalo Almeida (b), Onno Govaert (dms)

Label / Distribution : NoBusiness Records

C’est déjà le troisième disque de The Attic, l’un des trios symboliques du saxophoniste Rodrigo Amado. L’orchestre existe depuis 2017, même s’il s’est stabilisé depuis 2019 avec l’arrivée du batteur batave Onno Govaert aux côtés de la paire lusitanienne. C’est le contrebassiste Gonçalo Almeida, puissant et très proche d’Amado, qu’on retrouve ici. On sait tout le talent de ce musicien entendu en solo ou avec Ricardo Jacinto sur The Selva. Sur « New Tone », le morceau inaugural, on peut ainsi apprécier son travail structurant, à la fois calme et toujours sur la brèche, qui se marie très bien au jeu toujours brûlant de Govaert. On l’avait déjà constaté sur Summer Bummer : le Néerlandais est un allié parfait de la musique de Rodrigo Amado. Lorsque le ténor s’embrase, avec une rapidité fascinante, ce sont les cymbales qui nourrissent l’incendie. Quant à Almeida, il n’est jamais loin, à maintenir un équilibre qui s’illustre par sa solidité.

C’est l’immédiateté de The Attic qui est le principal comburant de la musique qui se consume ici. Avec « Encounter », d’apparence moins urgente, alors que le saxophone s’impose avec une sorte d’élégance innée, la batterie de Govaert cherche toujours la faille, une sortie dans laquelle s’épancher, dans un style peu éloigné de ce qu’il pouvait proposer avec un autre portugais, Marcelo Dos Reis, dans In Layers. La base rythmique a cette capacité à monter en pression de matière imperceptible, poussant toujours Rodrigo Amado dans ses retranchements où il est toujours chez lui, mais aussi en offrant à Gonçalo Almeida un solo d’une rare intensité. Il n’y a pas d’individualité dans The Attic, mais bien une volonté de chercher un point de fusion, quitte à passer par le point de rupture.

C’est « Outer Fields » qui illustre le mieux cette volonté. Cela commence par un dialogue presque effacé entre la contrebasse et la batterie. Puis Govaert monte en tension, sporadiquement, à force de gifle des cymbales. Lorsqu’Amado entre en scène, c’est presque avec langueur, se calquant sur une contrebasse placide. La fusion intervient alors, par sorte de vagues successives, toujours plus tranchante. De tous les trios dans lesquels le saxophoniste évolue, The Attic est l’un des plus équilibrés, même lorsque quelques explosions interviennent. Love Ghosts est un beau témoignage proposé par le label No Business.

par Franpi Barriaux // Publié le 19 février 2023
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