
D’Andrea - Tonani - Tommaso
Modern Art Trio
Franco D’Andrea (p, elp, ss), Franco Tonani (d, tp, songwhistle), Bruno Tommaso (b)
Label / Distribution : Gleam Records
Préparez-vous à une plongée dans une période musicale annonciatrice de grands changements stylistiques. Cette présente réédition rappelle combien Franco D’Andrea était en avance sur son temps ; ce ne sont pas une mais des musiques disparates qui se chevauchent dans cet album mythique du Modern Art Trio.
Dès 1963, Franco D’Andrea est découvert par le trompettiste Nunzio Rotondo, surnommé le Miles Davis italien, et qui eut l’honneur d’être félicité par Duke Ellington après avoir joué en sa compagnie. Ce musicien alors très renommé enregistre avec le soutien de la RAI la musique de la série télévisée Nero Wolfe, Franco D’Andrea en est le pianiste. Dès 1964, D’Andrea enregistre avec le batteur Franco Tonani qui publie Night in Fonorama. Avec eux sont présents le jeune prodige argentin du saxophone Gato Barbieri, et Giovanni Tommaso à la contrebasse, cousin de Bruno Tommaso qui apparaît dans cet album du Modern Art Trio. Suivent des enregistrements avec Franco Ambrosetti, Eraldo Volonté, Piero Umiliani, Giorgio Azzolini, Steve Lacy, Max Roach, Lee Konitz et deux amis dont les noms reviendront souvent tout au long de la carrière du pianiste, Enrico Rava et Aldo Romano. Ces rencontres expliquent mieux que tout la maturité exceptionnelle avec laquelle Franco D’Andrea enregistre ce disque à Rome les 17 et 18 avril 1970 pour le défunt label Vedette Records.
L’époque est aux changement cruciaux : Miles s’est détourné des structures du jazz traditionnel et a intégré à sa formation des instruments électriques, le piano Fender Rhodes en particulier. Le trio italien n’est pas en reste et si le morceau d’ouverture « URW » respecte les canons des trios acoustiques tout en évoquant un climat hérité de Martial Solal, il n’en est pas de même dans « Un posto all’ ombra » qui dérive vers des expérimentations novatrices. Franco D’Andrea y officie au piano électrique et incorpore des notes bien pensées au saxophone soprano. La section rythmique fait preuve d’inventivité, le batteur fait capituler la métrique et le contrebassiste use de son archet avec assurance. L’effervescence qui gagne le jeune pianiste se ressent dans « Frammento » qui n’est pas sans faire penser à McCoy Tyner et « Ain’t Necessarily So » où s’écoulent des accords fomentés naguère par Herbie Hancock.
Des compositions affirment le style en devenir du pianiste, « Beatwitz » et « Echi », toutes deux animées par leurs explorations variées. Durant les années qui vont suivre, Franco D’Andrea va connaître une période électrique à succès avec le groupe de jazz-rock Perigeo. Il reviendra à l’acoustique et au trio, enregistrant plusieurs albums déterminants dont l’hypnotique My One and Only Love paru chez Red Records en 1983 avec Mark Elias et Barry Altschul.
La réédition de cet album qui a marqué le jazz italien bénéficie d’une iconographie de très grande qualité, il est primordial de souligner l’excellent travail éditorial réalisé par Angelo Mastronardi et son équipe de Gleam Records.