Chronique

Rogantini, Battaglia, Zanus

Awen

Natalia Rogantini (voc), Stefano Battaglia (p, perc), Giacomo Zanus (g, electronics)

Label / Distribution : Auto Productions

En solfège, un soupir équivaut à un silence. Cette interruption du son s’insère dans le projet AWEN, consacré à un travail de recherche qui lie l’improvisation et de nouveaux arrangements d’airs traditionnels anciens. La suspension du temps résonne par les échos d’un monde ancestral qui fait ressurgir des chants celtiques oubliés. Avec ce trio constitué en 2021, la musique transcende les frontières géographiques et artistiques.

Natalia Rogantini a émergé en Italie en 2021 avec son album vocal en solo Quies Silentium, dédié au contrebassiste suédois Anders Jormin. Son souffle délicat imprègne « Port Na Bpùcaì » : tout le processus mélodique avance lentement, bercé par les superpositions sonores des guitares de Giacomo Zanus. Depuis des années, Stefano Battaglia se concentre sur son activité à Siena Jazz où il dirige un laboratoire permanent dédié à la recherche musicale. C’est dans ce cadre qu’il a mis en œuvre la collaboration avec ses deux partenaires. Il magnifie « Breisleach » par ses notes de pianos ciselées dans la dentelle. Cette comptine composée par Aonghas Macneacail et Donald Shaw se développe élégamment avec une intervention à la guitare acoustique de Giacomo Zanus. Intrigant, le climat brumeux qui envahit « Gleann Baile Chaoil » juxtapose la fragilité vocale et les sonorités hypnotiques des instrumentistes qui prennent une tournure aventureuse dans « A’ Mhaighdeann Bharrach ». Les ballades gaéliques et les chants de travail renaissent, sans cesse transfigurés.

Captées dans les années cinquante par l’ethnomusicologue Alan Lomax, des voix ressurgissent dans « Crodh Chailein » et se mêlent aux chuchotements de Natalia Rogantini. Non loin de ses expérimentations en duo avec Tony Oxley dans le lointain Explore, Stefano Battaglia apporte une dimension chimérique à cet album autoproduit qui ne quitte pas la platine. En totale adéquation avec ce joyau musical, la pochette est ornée d’une superbe photographie signée Sotiris Lamprou.

par Mario Borroni // Publié le 15 juin 2025
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