Sables Noirs
Cette nuit
David Haudrechy (ss, sopranino), Romain Barbot (modular, effect, kb).
Label / Distribution : Blwbck
L’histoire de ce projet débute avec le Covid. Les locaux de l’Institut Supérieur des Arts et du Design de Toulouse sont vides : leurs occupants ont été priés de quitter les lieux pour cause de pandémie. C’est catastrophique et c’est une aubaine puisque David Haudrechy – qui y enseigne – et Romain Barbot (ils s’étaient croisés régulièrement en se disant « faudrait qu’on fasse quelque chose ensemble ») prennent place dans ces locaux vides, branchent ce qui doit l’être, tournent les boutons avec précision et soufflent dans les becs au gré de choses improvisées. Tandis que Romain Barbot amène des nappes, cette matière électronique, David Haudrechy produit des phrases. Certaines cheminent depuis un moment dans sa tête et au gré de ses doigts, d’autres arrivent spontanément – n’est-ce pas là une définition du jazz ? – et le projet prend forme. Auparavant, les deux musiciens avaient choisi d’enregistrer la session. De ces rushes, ils retiendront les quatre morceaux qui constituent cet EP. Le projet était ficelé, l’album était né.
Alors qu’en dire, au-delà de son côté captivant ? Que tout, ou presque, est rubato et se déploie avec majesté. L’électronique a en effet cette vertu d’envelopper avec intensité d’un sustain infini celui sur lequel elle fond. C’est le cas ici, un peu comme Murcof l’avait fait en son temps en duo avec Erik Truffaz pour Mexico. Ce sont ses développements comme autant de nuits électroniques car le saxophone – tantôt soprano, tantôt sopranino – semble aussi ensorcelant que ce qui sort des potentiomètres. Un regret tout de même : que tout cela ne dure pas plus longtemps. On se réveille trop rapidement. Alors certes, on peut cliquer à l’infini sur le player, mais chacun de nous a déjà fait l’expérience d’un réveil qui coupe net une torpeur exaltée. C’est un peu ce qui arrive ici. On aurait bien doublé ce temps d’engourdissement où la rêverie est démultipliée.