Chronique

Soft Machine

Other Doors

John Etheridge (g), Theo Travis (ts, ss, fl, p, elec), Fred Thelonious Baker (elb), John Marshall (dms, perc) + Roy Babbington (elb).

Label / Distribution : Dyad Records

La parution à la fin du mois d’août de Other Doors, le nouveau disque de Soft Machine, a coïncidé à quelques jours près avec la disparition de son batteur John Marshall, qui nous a quittés le 16 septembre. Ce dernier, musicien d’une grande élégance dont la finesse et la précision du jeu étaient la marque, avait rejoint l’aventure en 1972 puisqu’on le retrouvait au sein de la formation dès l’album 5, aux côtés de Mike Ratledge, Hugh Hopper et Elton Dean. La vie de ce groupe, affilié à l’École dite de Canterbury, est complexe à résumer en quelques lignes ; elle a souvent fait l’objet de débats opposant les puristes (ceux qui ne jurent que par la première période, lorsque Robert Wyatt était aux baguettes) et d’autres, moins rigoristes et acceptant l’évolution de la formation vers un jazz-rock plus conventionnel s’écartant des incartades pataphysiques des premiers temps. Soft Machine a disparu à la fin des années 70, resurgissant bien plus tard en Soft Machine Legacy pour reprendre il y a cinq ans son appellation d’origine avec l’album Hidden Details en 2018 puis Live At The Baked Potato (2020).

Other Doors n’ajoutera rien de vraiment nouveau à cette histoire, même s’il n’est pas interdit de se laisser porter par une musique qui avance avec indolence sur le chemin d’un jazz-rock mélodique à la finition soignée. Les membres les plus anciens (John Etheridge à la guitare et John Marshall à la batterie) côtoient leurs condisciples entrés plus tard dans l’histoire : Theo Travis (remplaçant d’Elton Dean à compter de 2006) aux saxophones et Fred Thelonious Baker à la basse. Tout cela vous berce sans heurts, avec quelques retours en arrière et la reprise d’anciennes compositions : « Joy Of A Toy » issu du premier album en 1968 ou « Penny Hitch » (de l’album Seven en 1973) qui n’ajoutent rien à leurs versions originales. Même la présence sur deux titres d’un autre vétéran en la personne du bassiste Roy Babbington ne ravive pas vraiment les couleurs.

On voudrait être plus enthousiaste, se dire qu’on est chanceux de savoir qu’un tel groupe existe depuis plus de 50 ans et semble vouloir continuer l’aventure [1]. Mais il est difficile, admettons-le, de réprimer un léger bâillement à l’écoute de cette Machine un peu… molle ! Les meilleures choses ont une fin, dit-on. On aura avant tout une pensée émue pour celui qui vient de partir, laissant derrière lui beaucoup de souvenirs qui, eux, ne sont pas près de s’effacer.

par Denis Desassis // Publié le 15 octobre 2023
P.-S. :

[1Asak Sirkis remplaçant désormais John Marshall qui avait déclaré forfait l’an passé après l’enregistrement de Other Doors.