Le trompettiste déploie son swing imparable dans un carnet de voyages au cœur du jazz. Victime d’une fracture au bras gauche lors d’un séjour new-yorkais, il a transformé son immobilisation forcée en frénésie d’écriture. Le résultat en est un album d’excellente facture, oscillant entre rage féconde du be-bop, pour les plages up-tempo, et la douce sensualité du hard-bop pour les plages empruntant aux rythmiques funky et latines.
L’orchestre réuni ici par Fabien Mary est un octette, dans la grande tradition des formations de Jimmy Heath ou de Benny Golson à la fin des années cinquante, assumant une musique parfaitement arrangée et destinée à un auditoire exigeant qui n’en oublierait pas pour autant le sens de la danse. Le drive d’enfer fourbi par Mourad Benhammou derrière ses fûts et cymbales (quel son !) n’y est pas pour rien, de même la guitare qui sait se faire percussive sous les doigts d’un Hugo Lippi, sans parler du remarquable travail des vents, en particulier du groove velouté issu du saxophone baryton de Thomas Savy, ou des envolées lyriques de Pierrick Pédron au saxophone alto. Les autres membres du groupe sont à l’avenant, se fondant avec délectation dans l’exigence d’ensemble sans se départir de leur talent singulier.
Le trompettiste s’immisce alors dans les méandres de musique avec sensualité et rigueur, dans une simplicité toujours bienvenue, conduisant l’équipe vers des horizons d’harmonie et de rythme qui, parfois, semblent emprunter aux codes du « West Coast », tant c’est ciselé et aéré. Sept compositions et un standard (“All The Things You Are” magnifiquement orchestré) forment ainsi la trame d’un album remarquable par les images d’urbanité musicale qu’il génère, modelé par un all-star plus que brillant.