Chronique

Hanna Paulsberg Concept

Eastern Smiles

Hanna Paulsberg (ts), Hans Hulbækmo (d), Oscar Grönberg (p), Trygve Waldemar Fiske (b)

Label / Distribution : Odin Records

Hanna Paulsberg est une jeune saxophoniste norvégienne venue d’Oslo, passée par le Trondheim Jazz Orchestra, et repérée par ténors et cadors (dont Chick Corea qui l’a invitée récemment sur un album). Mais doit-on encore parler de jeunesse pour une instrumentiste qui fait virevolter son art depuis 15 ans ? Son quartet existe depuis 2010, soit un an avant sa sortie du Conservatoire, et est toujours actif.

Son jeu d’une grande élégance dévoile des influences venues d’un âge d’or américain que les moins de trente ans n’ont pas pu connaître : de sa première idole Stan Getz au Colosse Sonny Rollins. Ses phrasés, la Norvégienne les orne d’une belle rondeur qui cajole immédiatement les oreilles en demande (« Hotel Papa Charlie »). Mais doit-on réduire le son de la nouvelle génération à ceux qui l’ont nourri ?

Alors disons plutôt de Concept - nom du quartet d’Hanna Paulsberg - que son troisième album est bien ancré dans le présent. Il réactive le label de référence Odin, fondé en 1981 par la Norwegian Jazz Federation, qui était malheureusement en sommeil depuis 1994. Pour parfaire ce portrait d’ambassadeur de la nouvelle scène scandinave, ajoutons enfin qu’il s’est produit en première partie de l’ONJ à Paris en janvier 2017, à l’occasion de la présentation d’Oslo, dernier volet en date de l’épopée dirigée par Olivier Benoit.

Fluidité, thèmes et transitions impeccables tiennent l’éponyme « Eastern Smiles » debout. Trop droit peut-être, est-on tenté de penser. Si le démarrage pâtit d’un manque de patine, on réalise tout compte fait que l’idée est d’édifier quelques leitmotivs sonores qui ne vous lâchent plus les tympans après plusieurs semaines de tests d’écoute toutes dimensions.

Pour déstructurer l’ensemble (Paulsberg signe toutes les compositions), la capitaine peut compter sur ses trois acolytes dotés d’une appétence pour les musiques d’origine africaine. « Hemulen på byn » touche alors plus profondément avec ce côté primal dans lequel le duo piano (Oscar Grönberg) et batterie (Hans Hulbækmo), plus rêche, fait mouche, escalade à coups de piolet la paroi musicale pour atteindre des sommets plus ardus.

Contrepoint bienvenu, l’album se clôt sur « Catalan Boy » qui roucoule, cadence, swingue les deux pieds en terrain afro-américain, la tête dans les nuages. Un gimmick est né. C’est bon, c’est doux. On a hâte que la grâce sage s’émancipe. En attendant, Eastern Smiles ouvre appétit et curiosité, car il donne envie d’y revenir.