Sur la platine

Les couleurs estivales de Luise Volkmann

Petit guide musical des projets de la saxophoniste allemande.


© Terreur Graphique

Pour mieux cerner la musicienne, son univers et sa sonorité, rien de tel que d’écouter quelques-uns de ses derniers projets en date, tous différents mais tous avec la même ligne de conduite : une approche mélodique marquée, un son rond et dynamique et une grande liberté de ton.
La jeune saxophoniste Luise Volkmann, désormais artiste intégrée au dispositif de soutien et développement artistique NICA (pour les musicien.ne.s de Cologne), se prépare à sortir un nouveau projet avant-gardiste et poétique. Il est donc nécessaire de faire le point sur les productions en cours.

Luise Volkmann © Terreur Graphique

Été Large : When the Birds Upraise Their Choir
Cet ensemble fondé par la saxophoniste comprend des musicien.ne.s de différentes nationalités et sert une musique composée pour et avec des textes chantés, criés, déclamés. Il s’agit dans ce disque de partager une vision rétroactive des expériences collectives et révolutionnaires des années 70. Sex, drugs & rock’n’roll en quelque sorte. La voix et la diction toute particulière de l’Australienne Casey Moir apportent une couleur zappaïenne par moment, mais chaque morceau de cette suite est une ambiance à part. On trouve aussi dans ce disque, enregistré en 2019, le guitariste Paul Jarret, le trompettiste Timothée Quost, la contrebassiste Athina Kontou qui participe à nombre des projets de la saxophoniste, et réciproquement et au trombone, Janning Trumann qui est désormais le coordinateur artistique de la Cologne Jazz Week. Du beau monde donc.


LEONEsauvage : Dreams To Come
Le disque enregistré en 2019 présente la formation d’alors, rassemblée à Copenhague. LEONEsauvage est à géométrie variable, au gré des rencontres de sa compositrice et leader Luise Volkmann.
Avec cet orchestre festif et roboratif, c’est une véritable orgie de musique et de verbe, un peu comme le Surnatural Orchestra ou le Pimpono Ensemble du batteur Szymon Gąsiorek, d’ailleurs présent sur ce disque.
Les compositions sont en partie dédiées à Albert Ayler et les voix combinées de l’Islandais Hrafnkell Flòki Kaktus Einarsson et du Portugais João Neves sont soutenues par cinq saxophones endiablés. Avec une rythmique très énergique et puissante, cet orchestre dégage les bronches.


Autochrom : RGB
Le trio de la saxophoniste dans lequel elle expérimente d’autres voies de composition, plus ramassées, plus radicales. Avec Max Santner à la batterie et Athina Kontou à la contrebasse (deux membres de l’orchestre Été large), Luise Volkmann propose une petite dizaine de capsules musicales, sur le thème des couleurs et de l’image. L’altiste est mise en avant et le format en trio permet de l’entendre jouer avec précision et retenue. Claquements d’anche, souffle forcé, suraigus, les possibilités de l’instrument sont exploitées avec subtilité et le multipistes permet quelques effets réussis. Ce disque sort sur le label NWOG, produit par le tromboniste allemand Nils Wogram.


Mother & Athina Kontou : Tzivaeri
Cette fois-ci, l’altiste joue les compositions de la contrebassiste allemande, d’origine grecque. C’est d’ailleurs le sujet du disque dont la musique interroge ces racines culturelles dans une recherche identitaire personnelle. Le jeu très solide de la contrebassiste, accompagnée par un pianiste et un batteur, ouvre une nouvelle voie pour la saxophoniste qui doit participer à l’invention de ce jazz germano-grec dont les influences se comptent par centaines. Le disque en contient déjà de nombreuses et le mélange de sonorités et d’instruments divers permet d’échapper au classicisme du quartet rythmique + sax habituel.


Vasco Furtado - Salome Amend - Luise Volkmann : Aforismos
Le propre des rencontres est souvent l’improbable entente. Ces trois musicien.ne.s (Vasco Furtado à la batterie et Salome Amend au vibraphone) se sont découvert des affinités lors d’un festival et n’ont pas hésité plus longtemps avant de se retrouver en studio. Un trio d’improvisation, libre et assez porté sur le rythme : les deux tiers du groupe sont des percussions !
Mais rien de mieux pour s’exprimer sans filet, et la saxophoniste se laisse porter par l’énergie cliquetante de ses compagnons de jeu. Elle s’en mêle aussi en faisant sonner son sax alto avec tout ce qu’il permet d’effets percussifs.