Chronique

Nguyên Lê

Overseas

Label / Distribution : ACT

La discographie de Nguyên Lê est particulièrement riche. Le nombre d’albums bien sûr mais aussi la diversité des univers qu’il a explorés durant sa carrière en attestent. Car, indéniablement, Nguyên Lê est un musicien voyageur, de ceux qui parcourent le monde pour en rapprocher les hommes. On cite bien sûr le Vietnam qu’il ne manque pas de mêler à la guitare électrique mais également le Japon, le Maghreb, les Antilles et ce n’est sûrement pas sans raison qu’il fut un des membres fondateurs d’Ultramarine, groupe novateur des années 1990 dont la caractéristique majeure était de mélanger les origines et les horizons. Et en effet, d’Ultramarine à Overseas, son dernier projet, tout est question de mélanges, de cultures brassées, d’échanges. Cet « au-delà des mers » - la polysémie du terme laisse en fait entendre une vision plus complexe de la chose - est un album qui va au-delà de la musique puisque le guitariste l’a conçu comme un spectacle total. A la musique se joint en effet du cirque moderne vietnamien. On ajoutera que l’album n’est pas une simple succession de morceaux et qu’il s’agit d’un triptyque dont sept morceaux constituent la suite « Overseas ».

Mais si le projet est la rencontre entre musique et cirque, l’album musical est une entité qui se suffit. Si vous glissez le disque dans votre lecteur audio, vous serez ébloui sans autre considération circassienne. On retrouve avec délices les sonorités électriques du guitariste franco-vietnamien et surtout l’union entre la tradition et le rock. Dans « Yellow Earth » et « Red Sky », les deux morceaux qui ferment cet album et qui constituent la « Mother Goddess », la voix de Ngô Hồng Quang, la cithare dàn tranh de Lê Thi Van Mai et la flûte de Nguyên Hoàng Anh, en plus du xylophone en bambou d’Illya Amar, donnent un cachet traditionnel, tandis que s’y mêle une partie plus moderne du noyau de la formation (Nguyên Lê, Alex Tran notamment). La rencontre entre sons traditionnels et modernes ne s’arrête pas à ces deux morceaux. Elle transcende l’album comme elle était à l’origine du Ha noi duo avec Ngô Hồng Quang en 2017. Mais il ne faudrait pas envisager cette rencontre comme un simple collage. C’est bien plus profond et, en faisant cohabiter avec sagesse et bonheur ces deux entités, Nguyên Lê met un terme à la division entre Modernes et Anciens. Ce qui n’est pas rien.

par Gilles Gaujarengues // Publié le 27 octobre 2019
P.-S. :

PS : Nguyên Lê (g, b, electronics), Ngô Hồng Quang (voc on tracks 5, 12, 13, dàn nhi fiddle, dàn môi jaws harp on tracks 5, 6, dàn bâu monocorde on track 3, dàn tính lute on tracks 4, 7, 9, 10, 12), Illya Amar (vib, MalletKAT, T’rung bamboo xylophone on tracks 12, 13), Trung Bao (beatbox), Alex Tran (perc, d), Lê Thi Van Mai (dàn tranh zither on tracks 4, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13), Nguyên Hoàng Anh (bamboo sáo flute on tracks 4, 11, 12, 13), Minh Dàn Môi (dàn do bamboo percussion on tracks 2, 4), Cuong Vu (tp on tracks 10, 11), Chris Minh Doky (b on tracks 2, 12, 13)