Maussion, Tereygeol, Auffray, Amar
Abysskiss
Camille Maussion (ss, ts, vx), Pierre Tereygeol (elg bar, vx), Victor Auffray (euphonium, flugabone, vx), Illya Amar (vibraphone)
Label / Distribution : Auto Productions
Quartet à l’instrumentarium peu commun, Abyskiss est à l’initiative de la saxophoniste Camille Maussion et du guitariste Pierre Tereygeol, deux musiciens dont il est désormais acquis qu’il faut suivre leur parcours avec attention. La première est membre du Nefertiti Quartet ; le second participe au trio Suzanne qui avait su éveiller notre intérêt par la qualité de son écriture. Nous en trouvons d’ailleurs une nouvelle expression ici puisque le guitariste signe quatre compositions sur cinq, la dernière revenant à la saxophoniste. Le tout joue de manière unitaire grâce notamment à l’apport d’un cuivre (euphonium ou flugabone de Victor Auffray) et d’un vibraphone (celui de Illya Amar) qui permettent une coloration unique à l’ensemble et un liant évident dans la matière sonore.
Par la délicatesse et la rondeur de ses timbres, le groupe pose, en effet, des atmosphères satinées qui évoluent constamment et plongent l’oreille dans un bien-être de bon aloi. Ouvrant la porte à des voyages oniriques que l’auditeur a immédiatement envie de suivre, en peu de titres, Abyskiss invente une géographie féerique, avec ses étapes d’émerveillement et ses bifurcations inattendues. Une seule écoute n’épuise pas le propos : la force narrative du groupe et son homogénéité permettent de dresser une ligne forte qu’il est plaisant de suivre, mais dissimulent de nombreux détails d’importance qu’un approfondissement dévoile avec plaisir.
Tour à tour musique répétitive (sur le réussi titre d’ouverture « Her Place Near the River ») ou impressionniste, dans laquelle se dégage une pointe de mélancolie, chaque musicien y va de son apport indispensable. Les frappes nimbées d’harmonies du vibraphone coulent des nappes amples délicatement percussives qui se fondent dans les basses discrètes du cuivre au point de devenir une entité unique. Plus distincte, la guitare évoque de lointains cousinages avec Marc Ducret ou Julien Desprez, filtrés par une finesse de jeu toute personnelle et un usage toujours à propos de ses différentes techniques. Camille Maussion, quant à elle, déroule une intelligence de jeu lors d’un solo lyrique qui enlève la musique et lui permet d’aller plus haut encore.