Ozone Featuring Miklos Lukacs
This Is C’est La Vie
Christophe Monniot (s, fx, keyb), Emil Spanyi (p, kb), Joe Quitzke (dms, perc), Miklos Lukacs (cymb)
Label / Distribution : BMC Records
Depuis 2006 et le premier album d’Ozone, le duo du saxophoniste Christophe Monniot et du claviériste Emil Spanyi n’a cessé d’évoluer dans des atmosphères musicales bigarrées, du second Moniomania sur le label Budapest Music Center au travail phénoménal de Vivaldi Universel, avec, en filigrane cette envie manifeste de créer et de jouer ensemble. C’est de nouveau sur le label BMC que l’on retrouve les deux comparses dans cette formation qui se conjugue désormais en trio avec l’arrivée du rectiligne batteur Joe Quitzke, venu apporter de la stabilité au fragile équilibre entre le jazz onirique et la musette électronique qui caractérisait le premier album.
On retrouve les mêmes ingrédients, et de manière plus globale la luxuriance et l’humour qui caractérise l’univers d’un Christophe Monniot que l’aventure Vivaldi Universel semble avoir totalement libéré ; les bizarreries électroniques comme les reprises de standards décalées semblent plus construites et plus abouties sur This is c’est la vie que sur le premier Ozone, qui tenait parfois de l’expérimentation un peu vaine.
Les premières notes de « Back Gate », en ouverture de l’album, dévoilent la sonorité étrange du cymbalum [1] de l’invité du trio, Miklos Lukacs, seul jazzman répertorié à jouer de ce vénérable instrument, et musicien central des récentes sorties du label hongrois [2]. Ce premier morceau écrit par Spanyi est comme un manifeste méthodique de la nouvelle identité d’Ozone et de la liberté offerte par les deux nouveaux venus. Elle se traduit par une rythmique habile, des cassures électroniques pertinentes et l’enchevêtrement des maillets et des cordes dont on ne sait pas toujours s’ils sont le fait du cymbalum ou du piano visité par un Spanyi inspiré, devenu ici le clef de voûte de l’ensemble. Sur ce matériel dense, Monniot fait comme en apesanteur le grand écart permanent entre baryton et sopranino sans perdre de sa légèreté ni de son impétuosité…
Ozone utilise tour à tour le cymbalum et les artifices électroniques pour mieux se projeter dans différents univers. L’électronique est source de ruptures et de fausses pistes. Quant à Lukacs, on est émerveillé par sa polyvalence. Il peut évoquer une nostalgie nomade dans la belle reprise de « Passion » [3], jouer sur la dissonance (« This is c’est la vie », signé Quitzke) ou prendre le rôle de la basse (« Hymne 2 » qui démontre des qualités d’écriture de Monniot). Telle une bouffée d’air pur, tous les chemins empruntés par This is c’est la vie semblent conduire à un jazz lyrique et défricheur qui prendrait la reprise du « Sophisticated Lady » d’Ellington comme délicieux point d’orgue…