Chronique

Philip Catherine

Blue Prince

Philip Catherine (g), Bert Joris(tp,flg), Hein van de Geyn (b), Hans Van Oosterhout (d).

Label / Distribution : Dreyfus Jazz

Lyrique mais pudique, sensible et généreux, Philip Catherine joue comme il est, sans se ménager. Attentif à imprimer un tempo bien soutenu, avec peut-être trop de notes à son goût, lui qui se dit inspiré par Miles, alors qu’il fut le partenaire apprécié et régulier de Chet, et de tant d’autres depuis quarante ans qu’il sillonne la scène du jazz.

La couleur est donnée : c’est la fête du bleu ! Parti-pris de sobriété, d’élégance, des photos de la jaquette (où il pose, sagement attentif dans un jeu de miroir), à l’esprit même de ses compositions originales ou des standards qu’il reprend, nous plongeons dans le bleu du jazz, au plus profond de ce frémissement. Philip Catherine ne se prend pas pour un guitar hero : pas un instant sur plus d’une heure, il ne fait grincer les cordes ou distord son jeu par les pédales. Il joue à la note, délicatement égrénée, ravit par de superbes phrases, dans des envolées mélodiques très contrôlées, d’une imaginative rigueur. Comme dans les films de Woody Allen, on respire le parfum désuet des standards de jadis : il les fait swinguer dans la tradition de Django dans « With a song in my heart ». Ou encore ce « Memories of you », au son très cristallin. Catherine utilise les harmonies de l’inénarrable « Someday my prince will come » pour en donner sa version originale, un « Blue Prince » de circonstance, pour rester dans la note. Bleue.

Le seul morceau qui paraît plus fièvreux s’intitule justement « Global Warming ». Mais il demeure un peu exceptionnel dans la production de ce guitariste belge né à Londres !

Du jazz presque trop classique de nos jours où nos oreilles sont habituées à plus de violences ou autres dissonances. Mais une fois dans le sillon, on ne demande qu’à y rester, douillettement, avec un verre, en écoutant attentivement les subtilités du jeu de guitare, un sens véritable du rythme dans l’agencement des mélodies, dans les percussions des accords . Justement la technique est là qui facilite l’écoute : une solide rythmique belge, impeccable assise sur laquelle se développent les arabesques du trompettiste bugliste Bert Joris. L’association ( sans doute convenue) guitare-trompette a trouvé là ses maîtres. Des musiciens qui savent faire vivre la tradition . Avec l’intelligence du coeur .