Chronique

Stemeseder - Lillinger + invités

Umbra

Elias Stemeseder (elec, cla), Christian Lillinger (elec, dms, cla) + Peter Evans (tp), Russell Hall (b), DoYeon Kim (gayageum), Brandon Seabrook (bj, g)

Label / Distribution : Intakt Records

Compagnon de longue date de Christian Lillinger, avec qui il enregistra l’ambitieux Open Form For Society, le claviériste Elias Stemeseder nourrit depuis longtemps une passion pour l’électronique et les synthétiseurs vintage, même si c’est au piano qu’on a découvert son toucher sensible dans le trio de Jim Black ou encore avec Anna Webber. L’an dernier, sur le label Plaist, le duo avait enregistré Penumbra, pétri d’électronique ; Umbra, sur le label Intakt fidèle aux deux jeunes musiciens, propose une autre approche avec ses multiples invités. A base de cycles comme pour mieux approfondir la relation duale et lorgner vers une approche très contemporaine, en invitant successivement des musiciens proches de leur univers, à l’image du contrebassiste Russel Hall sur le très beau « Cycle III », qui s’immisce dans le dialogue entre les peaux des tambours et le son magnifique de l’Una Corda, au timbre si particulier. Au milieu des ostinati et du jeu très versatile de Lillinger, Hall apporte la sérénité, une assise.

Le rôle de ses invités est de révéler le duo, de le mettre en perspective. A ce jeu, c’est la joueuse de gayageum DoYeon Kim qui est la plus assidue. On l’avait découverte dans le remarquable Spider Season de Nick Dunston ; elle offre ici toute son énergie et une forme d’altérité qui sied au duo. Sur « Cycle VIII », elle introduit un morceau complexe où l’électronique sonne comme une forêt native. L’attaque franche du gayageum offre un relief aux basses profondes de Stemeseder, ainsi qu’une rythmique précise qui va introduire les cymbales de Lillinger peu avant la moitié du morceau. Il en résulte un chaos complexe et lancinant que l’on retrouve à de nombreuses reprises sur Umbra. Autre invité régulier, le guitariste et banjoïste Brandon Seabrook qu’on retrouve avec Kim notamment sur le Central « Cycle V » où les cordes s’échappent de déflagrations électroniques successives que Lillinger ponctue de quelques percussions métalliques. C’est également Seabrook qui accompagnera Peter Evans sur un « Cycle VI » plus languide.

Avec Umbra, Lillinger et Stemeseder célèbrent le son comme matière première d’un très beau duo. Un disque aux multiples facettes, comme un prisme qui pointerait la lumière vers le point le plus chaud. Les textures choisies par les deux musiciens offre un beau panorama de leur musique qui trouve ici sa plus claire expression.

par Franpi Barriaux // Publié le 17 septembre 2023
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