Chronique

Tibre

Archipel invisible

Thibault Renou (b, elec), François Chesnel (p), Misja Fitzgerald Michel (g), Antoine Paganotti (d), Anandha Seethanen (voc).

Label / Distribution : Compagnie Miniatures

Les alliages entre les sons générés par l’électronique et les respirations du piano sont perturbées par des champs magnétiques. La musique flotte, imperturbable. « Fragments (Of Adam) » éveille les sens tout autant qu’il interroge. Tibre c’est Thibault Renou, compositeur et contrebassiste qui anima un trio en compagnie de Hiroshi Murayama et Laurent Bataille. Archipel invisible fait suite à Maïsha Suite et confirme l’attirance qu’a cet artiste pour la diversité musicale.

« Miniatures » révèle une formation acoustique qui, avec circonspection, accueille des sons électroniques hypnotiques. La partition répétitive énonce des phrasés minimalistes propagés par le pianiste François Chesnel et le guitariste Misja Fitzgerald Michel ; les cymbales d’Antoine Paganotti ponctuent délicatement le propos musical. « Archipel invisible » distille des signaux sonores et converge vers des variations temporelles. Les superpositions rythmiques sont traversées par la guitare acoustique à douze cordes qui déchire les sonorités atmosphériques.

« Ambages » évoque des atmosphères chères à Teddy Lasry et rappelle que ce disque s’inscrit bien dans une tradition des musiques électroniques françaises. Le développement de cette composition nous fait entrer dans un voyage constamment intrigant. L’expérience de la composition qu’a développé Thibault Renou depuis la lointaine l’époque où il dirigeait le Bibendum Big Band se confirme avec « Hard Echo ». Cette pièce, véritable laboratoire de recherches soniques et de rythmes qui s’entrecroisent, est rehaussée par les déclamations vocales d’Anandha Seethanen. Née à l’île de la Réunion et désormais installée à Paris, cette jeune femme fait partie du quatuor vocal Parisian Way et elle embellit tout autant le gospel que Jimi Hendrix avec son chant exquis. Invitée dans ce morceau, elle transforme les matériaux dysharmoniques par une troublante mélopée humanoïde.

Cet album célèbre l’alliance réussie entre de nombreuses résonances électroniques élaborées et l’éclat des tonalités acoustiques. Les déploiements des séquences musicales tiennent continuellement en haleine.

par Mario Borroni // Publié le 27 avril 2025
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