Portrait

Adam Shead, apôtre du DIY

Le batteur de Chicago sort de sa torpeur.


Adam Shead @ Dave Schroeder

L’album Full Cycle, Thread New (Shifting Paradigm Records) marque un renouvellement pour un musicien qui a su surmonter les profonds découragements provoqués par la pandémie de COVID-19.

Adam Shead est originaire de South Bend dans l’Indiana, une ville connue pour la célèbre université de Notre-Dame et plus récemment pour son ancien maire, Pete Buttigieg, candidat malheureux aux primaires du parti démocrate aux dernières élections présidentielles et aujourd’hui ministre des transports. Le batteur s’installe à Chicago en 2011 pour étudier à la Columbia University où il estime avoir accès à un corps professoral de haut niveau. Il dénombre trois mentors influents. « Jarrett Hicks est avant tout un excellent batteur, affirme Shead. Il m’a aidé à personnaliser mon approche tout en développant des qualités techniques – par exemple, improviser tout en conservant une bonne tonalité. » Le clarinettiste James Falzone qui enseigne l’histoire de la musique lui fait rencontrer des musiciens locaux et constitue sa porte d’entrée sur la scène locale. Enfin, le contrebassiste Doug Lofstrom lui enseigne comment la composition et l’improvisation se recoupent.

La présence de Shead commence à se faire sentir au travers de son implication au sein de Slate Arts and Performance, une association gérée par deux artistes, Jennifer Hargrave et Benjamin Kerns. Ses activités tournent autour de la programmation ponctuelle de concerts et de l’organisation d’une jam session bimensuelle dans un local situé à la lisière de Humboldt Park, le quartier portoricain. « Cette expérience m’a beaucoup appris et m’a permis d’acquérir un sens de la communauté, dit-il. Ce lieu a souvent pris la forme d’un atelier et est devenu un endroit idéal pour les jeunes musiciens. D’excellents groupes sont nés là. » La pandémie a malheureusement forcé sa fermeture en août 2020.

Adam Shead @ Dave Schroeder

Toutefois, la crise sanitaire n’a pas eu que des effets néfastes. En février, Shead fête la sortie de Full Cycle, Thread New, une composition ambitieuse en trois mouvements. « La pandémie a été une année de cogitation qui a débouché sur un nouveau départ, explique-t-il. Chaque section repose sur une approche différente de la composition qui est développée grâce à l’improvisation. » Le batteur réunit un quintet original avec une section rythmique classique composée du pianiste Matt Piet et du contrebassiste Andrew Scott Young, complétée par un électron libre, le violoncelliste Ishmael Ali qui ne néglige pas l’électronique, et un soliste, le clarinettiste Jeff Kimmel. « Mon approche esthétique est ancrée dans le jazz avec des éléments dadaïstes ou provenant de la noise music, et je recherchais des musiciens qui parlaient des langages différents et qui partagent ma volonté de communiquer. »

Full Cycle, Thread New est composée de sections diamétralement opposées. Tout commence avec un groove plaqué sur un tempo trépidant, suivi d’une plongée bop avec éléments électroniques avant de terminer par une sombre mélodie. Dans son rôle de leader, Shead cherche à faire ressortir les qualités des musiciens qui l’entourent et les encourage à introduire des éléments pouvant suggérer une tout autre direction ou bien déstabiliser. Cette approche trahit une forte influence des Hollandais de l’Instant Composers Pool avec un aspect théâtral qui ressort sur scène.

Parmi les autres activités récentes du jeune Chicagoan, il faut citer le trio avec Damon Smith à la contrebasse et Jason Stein à la clarinette basse. Le récent album Volumes & Surfaces (Balance Point Acoustics) documente une des excursions d’un groupe qui s’investit corps et âme dans l’improvisation totale.