Phillips, Locatelli
Danze degli scorpioni
Giancarlo Nino Locatelli (cl, bcl, voc), Barre Phillips (b)
Label / Distribution : We Insist !
Il y a ce son immédiatement identifiable, un pizzicato d’une grande clarté et cet archet qui sublime les cordes de la contrebasse. Les doigts de Barre Phillips ne cessent d’inventer des chants resplendissants depuis soixante ans, sa renommée mondiale fait de lui un interprète singulier. En novembre 1968, son solo de contrebasse Basse Barre fut le premier à être enregistré dans ce registre musical. Music from Two Basses , publié en 1971 sur le tout nouveau label ECM, inaugurait un cycle de duos planétaires. Depuis, Peter Kowald, Derek Bailey, Joëlle Léandre, Barry Guy, Motoharu Yoshizawa, Joe Morris, Masashi Harada, Émilie Lesbros, Teppo Hauta-Aho, Malcolm Goldstein, Eric Plandé, Mike Bullock, Daniele Roccato, Denman Maroney, György Kurtág jr. côtoient le maître sur des albums précieux. Danze degli scorpioni s’ajoute à cette liste conséquente et permet à Giancarlo Nino Locatelli de donner la réplique à Barre Phillips.
Ce disque édité récemment a été enregistré en 2008 au festival autrichien Kaleidophon d’Ulrichsberg. Quatre pièces se suivent sans que l’attention retombe un seul instant. « Danze degli scorpioni n° 1 » se présente sous la forme d’une improvisation de plus de vingt-cinq minutes, les précipitations s’allient aux mouvements successifs partagés entre le calme et l’énonciation progressive de tensions. Cette pièce témoigne de l’entente télépathique entre les deux musiciens, en particulier dans le final où les cordes et la clarinette basse exultent. L’introduction vocale du contrebassiste qui présente « Dark Moon Dance One » précède les souffles vaporeux du clarinettiste, le jeu d’archet est extrêmement fin, quasi éthéré. Plus percussif, « Dark Moon Dance Two » sème des graines destinées à produire des notes sauvages, questions et réponses se succèdent avec allégresse et « Danze degli scorpioni n° 2 » se construit par des susurrements délectables.
Cet album hétérogène est vivifiant, il échappe à toutes sortes de délimitations encombrantes. Barre Phillips et Giancarlo Nino Locatelli respectent l’histoire, ils pratiquent une musique d’aujourd’hui mais n’oublient pas de dédier leur dialogue musical à un illustre improvisateur, Coleman Hawkins.