Chronique

Butcher, Thomas, Lash, Noble

Fathom

John Butcher (ts, ss), Pat Thomas (p), Dominic Lash (b), Steve Noble (dms).

Label / Distribution : 577 Records

Voyageur des musiques improvisées, il arrive que le saxophoniste John Butcher revienne dans son île natale pour un orchestre strictement britannique. Compagnon de longue date du pianiste Pat Thomas, il rencontre avec Fathom une autre légende de sa génération, le batteur Steve Noble, et un contrebassiste de 20 ans son cadet, Dominic Lash, qu’on avait pu notamment déjà entendre dans l’orchestre du pianiste Alexander Hawkins. Une belle équipe pour une musique libre, frappée du sceau de l’urgence : la première partie est l’occasion d’assister à une belle passe d’armes entre le piano de Thomas et la déchirure pleine d’acide du saxophone de Butcher.
 
Cette discussion est le cœur d’une longue improvisation en trois strates : le pianiste fouille les entrailles de son piano et la tension repose sur la contrebasse, dont le travail souterrain est impressionnant. Plus loin, sur « Fathom part.2 », c’est encore Lash qui conduit les tentations bruitistes de ses aînés par un jeu simple, presque détaché : dans ce morceau plus long qui laisse davantage de place au silence, ce qui n’enlève rien à la tension, Steve Noble joue de multiples percussions, fait tinter des bols, fouaille dans les détails pendant que Pat Thomas émerge sur ses touches. Butcher, d’abord en retrait, fait surface dans le dernier tiers du morceau pour retrouver un piano frappeur, libéré et lumineux, extrêmement solide. La musique entame un nouveau cycle, comme un printemps nouveau et ses éclosions inéluctables.
 
Si l’on retrouve par moments le Butcher de Powechsel dans ce luxe des détails microscopiques et des niches abstraites (notamment dans les instants où les cordes de la contrebasse et du piano dialoguent avec Noble), la musique de Fathom est plus directe, plus acrobatique aussi lorsque l’archet de Lash retient un ténor conquérant dans la troisième partie, de loin la plus intense. Avec ce nouveau quartet, et ce premier disque pour le label étasunien 577 Records, John Butcher nous présente la grande vivacité de la scène improvisée anglaise, toujours aussi explosive.

par Franpi Barriaux // Publié le 14 avril 2024
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