Chronique

Caravaggio

Tempus Fugit

Bruno Chevillon (b, eb, effects), Eric Echampard (dm, percussions), Benjamin de la Fuente (vl, g, effets), Samuel Sighicelli (sampler, orgue Hammond, synthétiseurs) + Serge Teyssot-Gay (eg)

Caravaggio réunit, depuis 2005, quatre individualités venues de la musique contemporaine (Benjamin de la Fuente et Samuel Sighicelli) ou du jazz de création (Bruno Chevillon et Eric Echampard, paire rythmique du trio de Marc Ducret et du premier ONJ d’Olivier Benoit) et déploie un projet musical aux contours bien définis qui avait fait, notamment, la réussite de Turn Up voici cinq ans.

On retrouve aujourd’hui les mêmes caractéristiques d’un discours sous tension à l’élasticité électrique. Clairement positionné sur les territoires d’un rock massif dans lequel la frontalité du son est le moyen d’atteindre un impact direct, la formation réussit toutefois à faire sienne les enjeux d’une musique également basée sur l’expectative. Des sas d’attente sourde où mature un matériau fortement texturé, à base d’effets électroniques, trouvent leur exutoire à la suite de montées progressives nerveusement contenues. Elles atteignent leur climax dans des lignes martiales souvent heurtées où la batterie fait merveille.

Des phénomènes de déstabilisation et d’accélération ponctuelles génèrent une dynamique de l’inattendu et déploient des paysages fortement contrastés qui tiennent par la puissance du sillon profondément creusé. La présence, sur une plage, du guitariste Serge Teyssot-Gay ajoute une épaisseur supplémentaire au collectif en laissant s’écouler une lave salissante et nerveuse. Ce disque noir particulièrement réussi n’est pas sans évoquer les propositions proches entendues chez des groupes post-punk des années 90 comme Hint et, surtout, Bästard.

par Nicolas Dourlhès // Publié le 19 avril 2020
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