Scènes

Monniot et Ithurssarry, petit tour de nostalgie

Christophe Monniot et Didier Ithurssarry au Régional Tour de l’Europa Jazz.


Didier Ithurssarry, photo Christophe Charpenel

Un régional tour de l’Europa Jazz atypique puisque déprogrammé pour cause de covid, reporté partiellement à l’automne. Certaines dates toutefois permettent de retrouver le duo choisi cette année. Didier Ithurssarry et Christophe Monniot défendent le second volet de leurs Hymnes à l’Amour. Avec toujours le même enthousiasme et la même générosité, ils ont enchanté début novembre la soirée au Théâtre de l’Avant-Scène à Trélazé, à côté d’Angers.

Depuis plusieurs années maintenant, en anticipation du grand final de l’Europa Jazz Festival du Mans, le Régional Tour porte le jazz vers les endroits fréquentant peu ou moins certaines propositions culturelles : les campagnes notamment, celles des Pays de la Loire en particulier. Bojan Z, Vincent Peirani et Émile Parisien, Théo Ceccaldi et Roberto Negro ont ainsi arpenté la Vendée, la Mayenne, la Sarthe ou la Loire-Atlantique, avec, à chaque fois une étape obligée dans la petite et conviviale salle de la ville de Trélazé, Maine-et-Loire.

Cette année, prévu en mars-avril, le duo Christophe Monniot et Didier Ithurssarry présente Hymnes à l’amour, seconde chance (un disque existe, paru chez Emouvance). Pourtant vu deux mois et demi plus tôt dans un autre contexte, le programme conserve sa fraîcheur. La complicité entre deux musiciens qui se côtoient depuis une quinzaine d’années y est certainement pour beaucoup. La connivence, les sourires, les hochements de tête sont les signes d’une entente qui rejaillit inévitablement sur la musique.

Dans un équilibre subtil entre compositions personnelles inspirées par et reprises tirées de grandes figures du répertoire (Ellington, Edith Piaf, Tony Murena), le duo se donne la réplique avec une nostalgie qui cache une sophistication fertile. Car, monstres de technique, ils donnent la dimension d’un spectacle pyrotechnique (mention spéciale cette fois à « East Side » qui s’écoute comme un film) à des pièces toujours séduisantes.

Les mains puissantes d’Ithurssarry, son jeu physique et toujours attentif font de l’accordéoniste un précieux partenaire capable de sonner comme un orchestre. Sans être envahissant, il stimule le chant de Monniot en l’amenant plus loin encore. Dans ses postures comme dans sa pratique, le saxophoniste mélange l’humour et la sensibilité. Ses brassées de note basses d’où il extrait soudain des aigus fulgurants en font un prestidigitateur loufoque qui tire une larme du chapeau à des moments inattendus.

Dans l’intimité de cette salle attentive, le duo amoureux déclare sa flamme aux musiques du vingtième siècle. Populaires, dansants, recherchés et immédiats, intemporels et fugaces, ils prennent en chasse le temps qui passe inexorablement et le retiennent un peu. Si aujourd’hui est magnifique, avant, c’était bien aussi. Savourons, avec ces quelques notes, ce souvenir qui s’enfuit déjà…