Sur la platine

Jeanneau & Segal : duo pour deux, mais pas plus

François Jeanneau et Vincent Segal : quand un et un font à peu près deux. Voire plus.


Figure majeure du jazz hexagonal, membre d’un trio incontournable pour qui veut connaître l’histoire de cette musique dans ce pays (Jeanneau / Humair / Texier), premier directeur de l’Orchestre National de Jazz, premier enseignant du département du Conservatoire National Supérieur de Musique, François Jeanneau (87 ans au compteur mais beaucoup plus jeune à l’écouter) a su s’approprier les leçons des maîtres américains dès les années 60 et développer par la suite des conceptions répondant à sa sensibilité.

Cet enregistrement paru récemment sur bandcamp constitue une belle surprise. Il est l’occasion de retrouver un phrasé chaud toujours empreint d’exigence et de sensibilité.

En duo avec le violoncelliste Vincent Ségal, enregistré au Théâtre de l’Œuvre et au Conservatoire Pierre Barbizet de Marseille, il nous livre une suite chapitrée en dix parties qui nous conduit le long d’un parcours aux étapes variées mais à la progression naturelle. Partant d’une entame exigeante, même si mesurée, dans l’abstraction, il nous guide au final, et avec délicatesse, sur des terrains plus enjazzés dans lesquels l’oreille baigne avec abandon.

Il faut dire que l’entente est réussie entre les deux musiciens. En accompagnateur attentif, Ségal livre une partition renouvelée d’idées stimulantes et délicieuses. Il offre des phrases claires, toujours équilibrées, qui viennent relancer les propositions de son partenaire sans pour autant se cantonner au rôle d’accompagnateur. Le saxophoniste le sait bien, qui laisse respirer la musique et recherche à chaque note l’intention juste. Les deux se cherchent, se trouvent souvent et se tournent autour avec beaucoup de grâce. Un duo discret, voyageur, qui se suffit à lui-même mais offre une appréciable légèreté et un discours en transparence.