Chronique

Guillaume Grenard & Melissa Acchiardi

La ferme des animaux

Mélissa Acchiardi (cla, perc, voc, d, fx), Guillaume Grenard (tp, b, voc, fx) + guests

Label / Distribution : ARFI

Les spectacles pour enfants sont l’occasion de faire montre de beaucoup de créativité. A condition de ne pas prendre le public pour des débiles et d’apparaître trop manichéens. Avec La ferme des animaux, le conte très politique de Georges Orwell, il y a peu de chance que l’intelligence ne soit pas au rendez-vous, d’autant que c’est l’ARFI et leurs éminents membres Guillaume Grenard et Mélissa Acchiardi qui sont à la manœuvre. Avec un grand nombre de narrateurs qui endossent les pelisses des animaux de la ferme, de Murielle la chèvre polyglotte à Nanard le canard qu’on a parfois envie de faire rimer avec un autre mot en -ard [1]. Plus proche du Grand Méchant Renard de Benjamin Rennert que des Petites bêtes d’Antoon Krings (« Machine à tout »), C’est avec beaucoup d’humour que le duo augmenté aborde le récit de l’émancipation de la basse-cour et le lent basculement vers l’autoritarisme.

Dans ce duo, Grenard et Acchiardi se chargent de tout : elle joue de toutes les percussions, qu’elles soient à clavier ou bardées d’électronique, il souffle dans tout ce qui se présente ou fait montre de sa maîtrise très punk de la basse électrique. Ce punk qui n’est d’ailleurs jamais loin : on pense de loin en loin au travail du label Boucherie productions et de François Hadji-Lazaro sur les spectacles pour enfant [2], et l’approche très iconoclaste et rebelle de la géniale œuvre d’Orwell permet toutes les folies et les clins d’oeil. On en oublierai même la présence d’une plage fantôme, pratique pourtant dénoncée par la communauté internationale depuis près de trente ans.

Il y a dans ce disque un certain nombre de morceau de bravoure qui peinent à sortir de la tête, à l’image de la « chèvre d’état » qui accueille une scansion remarquable, ou encore le rap de Jason le dindon (« derrière le portail »). C’est cependant « Moloch », qui adopte « Greensleeves » et surtout « mon espérance » à la rythmique impeccable qui se présentent comme les morceaux les plus brillants d’un album réjouissant. La ferme des animaux va comme un gant à Mélissa Acchiardi et Guillaume Grenard.

par Franpi Barriaux // Publié le 30 juin 2024
P.-S. :

[1Rappelons néanmoins qu’il s’agit d’un spectacle pour enfant, et qu’il n’était pas question pour le trompettiste de l’ARFI ni d’offrir une rime riche facile, ni d’avoir des problèmes avec les ligues de vertu.

[2Réécouter le disque Petites Oreilles semble indiqué.