Chronique

Joel Harrison

Still Point : Turning World

Label / Distribution : Whirlwind

Still Point : Turning World, c’est le superbe titre donné par le guitariste Joel Harrison à sa nouvelle œuvre, et quelle œuvre, sortie en septembre 2019 sur le label Whirlwind Recordings.

Il s’agit d’une citation du poète T.S Eliot empruntée à ses Four Quartets composés entre 1935 et 1942, des méditations sur la relation de l’homme avec l’univers et le divin. La traduction des vers pourrait donner : « Au point de quiétude du monde qui tournoie. Ni dans la chair ni désincarnée, ni provenance ni visée. Au point de quiétude, là est la danse. »

L’œuvre, dantesque, explore et réinvente les liens entre jazz et musique indienne, en huit mouvements composés par le sexagénaire américain pour quartet de jazz, sarod et formation de percussions.

Des pointures pour la formation jazz, d’abord : Joel Harrison aux guitares électrique et acoustique, Ben Wendel au saxophone et au basson, Dan Weiss à la batterie et aux tablas, et Hans Glawischnig à la basse.

Au sarod (luth du nord de l’Inde), un artiste quarantenaire de formation indienne vivant à New York avec lequel Joel Harrison collabore sur de précédents albums, Anupam Shobhakar.

Pour la formation de percussions enfin, des membres du Talujon Quartet de New York ainsi que A. Selvaganesh au kanjira (petit tambour du sud de l’Inde).

L’œuvre, on l’a dit, est hors norme, épique : une véritable odyssée de percussions et de fusion de rythmiques du monde réinventées, avec en son centre deux plages de répit.

Les deux pièces, ou mouvements puisque c’est ainsi que Joel Harrison les nomme, les plus ambitieuses et les plus marquantes durent, la première plus de 9 minutes et la septième, plus de 12 minutes.

Le premier mouvement, « Raindrops in Uncommon Times », s’apparente à une entrée en piste successive des artistes : la guitare blues ouvre, puis successivement marimba, sarod, sonorité chaude du saxophone porteur de la mélodie, tablas, guitare électrique… Une improvisation vocale à la 5è minute se pose sur un lit de marimba hypnotique. Après un crescendo collectif, ce premier des huit mouvements se referme sur le bercement du marimba seul.

Le septième mouvement, « Creator/Destroyer », est le plus complexe. Il s’ouvre par une extraordinaire introduction de 3 minutes de batterie et percussions, d’abord solennelle puis tout en explosion sauvage. La pièce multiplie ensuite les solos et les duos : saxophone, duo guitare / sarod, sax / batterie, tablas / sarod…

par Alice Leclercq // Publié le 26 janvier 2020
P.-S. :

Personnel :
Joel Harrison - electric, National Steel, acoustic guitars.
Anupam Shobhakar - sarod.
Ben Wendel - sax, bassoon.
Dan Weiss - dms, tablas.
Hans Glawischnig - acoustic bass.
Stephan Crump - acoustic bass.
Members of Talujon Percussion Quartet : David Cossin - bells, toms, snare, woodblock, cajon, bongos, bass drum. Matt Ward - marimba, vibraphone, timpani, glockenspiel. Michael Lipsey - street drum, talking drum, vibraphone.
Guests : A.Selvaganesh - kanjira, udu, konnakol.