Scènes

John Surman Quartet

Les papys brittons à La Villette


Jazz à la Villette, Cité de la Musique, jeudi 12 septembre 2002.

John Surman (ts, ss, bcl), John Taylor (p), Chris Laurence (b), John Marshall (d).

En première partie du concert de John Surman, les allemands Jens Thomas (p) et Christof Lauer (ts, ss), plus le quatuor à cordes Indigo String Quartet, ont eu l’idée saugrenue de présenter leurs arrangements originaux de la musique de Sting. Les musiciens ont été tout à fait solides, le travail professionnel et bien présenté. Est-ce que la musique de Sting était vraiment ce qu’il fallait pour un tel effort ? Je n’en ai pas été convaincu. Passons.

John Surman est apparu sur scène avec sa coupe de cheveux, ses moustaches et sa chemise polyester à motifs sortis tout droit des années 70. La musique aussi, d’ailleurs - bon, disons années 70/80 - mais sans avoir pris une ride. Pensez aux groupes acoustiques de Chick Corea ou Herbie Hancock, à Dave Liebman, Joe Farrell ou le Kenny Wheeler de Gnu High. Une musique richement mélodique, harmoniquement étoffée, aux rhythmes swinguants mais souples - aucune trace de la marche forcée vers les roots qu’exige un Wynton Marsalis, ni de mélange world à la mode, ni d’électronique, hip-hop, ou musique contemporaine. Tout ça peut avoir des résultats heureux, bien sûr, mais nos quatre lascars ne semblaient pas concernés. Ils étaient eux-mêmes, sans prétention et sans ironie.

Mais avec un talent certain. Surman a joué, tour à tour, du soprano, du baryton et de la clarinette basse, menant son quartette à travers de beaux paysages variés, car leur musique avait ce côté narratif - « story-telling » en anglais - ça racontait des histoires, ça nous menait quelque part, en passant par un jazz post-bop relativement classique et divergent ici et là vers des sons plus libres. Le pianiste John Taylor, lyrique et incisif, était un partenaire idéal pour le jeu robuste et généreux de Surman. Le tandem rhythmique formé par Chris Laurence à la contrebasse et John Marshall à la batterie n’avait peut-être pas toute la virtuosité instrumentale de, par exemple, un Dave Holland et un Jack DeJohnette, qui ont aussi accompagné Surman et Taylor à différents moments, mais on ne leur en demande pas tant. A l’écoute et parfaitement engagés dans la musique, ils ont fait avec les autres un vrai ensemble.

Après un bis le quartette a salué le public ravi, donnant à voir leurs crânes grisonnants ou chauves. « C’est une vraie bande de papis », a dit une dame à ma droite. « Finalement, c’est la génération la plus sympathique. » Après ce concert réjouissant et chaleureux, je me disais qu’elle avait peut-être bien raison.