Scènes

Le trio_io et les musiques non conventionnelles

Concert du trio_io au Fotografiska de Tallinn / Jazzkaar 2022.


trio_io au Jazzkaar 2022 © Eve Saar

Le Fotografiska de Tallinn accueillait les Polonais du trio_io dans le cadre d’une candidature pour la reconnaissance de ville culturelle par l’UNESCO. Une esthétique peu commune et une expérience unique.

Łukas Marciniak au Jazzkaar 2022 © Siiri Padar

Tout est parti d’un son, une note tenue à la guitare électrique via un e-bow, presque infinie. Flûte et violon s’y sont superposés pour former un très beau maelstrom constitué de notes qui s’étiraient, s’enroulaient, se déroulaient. Souvent pas de rythme, mode rubato pourrait-on dire, mais une plainte, une déchirure ou, et ce n’est d’ailleurs pas contradictoire, une peinture se réalisant là, devant les yeux et les oreilles des spectateurs. Les trois musiciens, en l’occurrence Zofia Ilnicka à la flûte, Łukasz Marciniak à la guitare et Jakub Wosik au violon, jetèrent en effet moult coups de pinceau sur la toile. Il y avait quelque chose de Pollock dans cette fresque incroyable : un modernisme sans concession pour sûr. Le parti pris d’une très grande liberté aussi.

Et puis arriva une parenthèse plus guillerette, plus enfantine aussi. Une ronde peut-être ? Un jeu de balançoire ? A moins que ce ne soit une cavalcade d’insectes. Allez donc savoir.

En fait le trio_io proposait une matière sonore sur laquelle tout un chacun imaginait, selon son humeur, ses convenances, ses envies aussi, à la fois l’univers, les personnages et le scénario.

Bien entendu, la musique était organique ainsi qu’en témoigne le jeu de Zofia Ilnicka, souvent dans un continuum entre souffle et sifflement ou la guitare et le violon qui devenaient très régulièrement des instruments percutés.

Il faut accepter de se jeter sans a priori dans ce genre d’expérience musicale. La musique ne s’y appréhende pas comme une mélodie boite-à-rythmée. Elle est même inaccessible pour qui ne voit les choses qu’en beau ou pas. Elle ouvre en revanche des milliards de possibles pour celui qui, a contrario, s’engouffre sans réserve dans cette transe psychédélique.