Chronique

Mário Costa

Oxy Patina

Mário Costa (dm), Marc Ducret (g), Benoît Delbecq (piano, claviers)

Label / Distribution : Clean Feed

Partenaire de choix, le batteur portugais Mário Costa participe, depuis quelques années maintenant, à de multiples projets pertinents. Au côté du contrebassiste Hugo Carvalhais pour le lunaire et enthousiasmant Grand Valis ou encore avec Jean-Brice Godet sur Mujô, il sait donner ce qu’il faut de swing pour maintenir une tension pulsatile sans jamais renier une forme de sophistication qui le place définitivement dans la modernité. Entendu dernièrement encore dans le Sfumato d’Emile Parisien, aux côtés de Michel Portal et Joachim Kühn, il publie aujourd’hui son premier disque sous son nom et prouve qu’il est à même, outre sa capacité à se mettre au service des autres, de développer un univers personnel.

Entouré par deux des personnalités majeures du jazz contemporain, Mário Costa conduit le trio sans que le style affirmé de ses deux partenaires empiète sur son propos. Complémentaires mais peu entendus en formation réduite, Marc Ducret et Benoît Delbecq se côtoient depuis de nombreuses années - si on songe que Bleu sur Scène, paru sur le label Sans Bruit, date déjà de 2006 - et leur mode de jeu est de ceux qui alimentent intelligemment un discours général au bénéfice d’une sensibilité.

Enregistré durant les répétitions puis en concert dans le cadre du Festival Jazz na Praça da Erva au Portugal, Oxy Patina est effectivement parfaitement maîtrisé malgré les conditions du live, la fraîcheur de l’improvisation apportant beaucoup de spontanéité à des compositions par ailleurs soignées. La poétique que déploie Mário Costa accueille, voire génère des échanges sensibles. La mélancolie, raffinée sans être précieuse, de “Forest Marble” permet, par exemple, à Benoît Delbecq de s’engager, à partir d’une berceuse étrange, dans un romantisme sobre sur un tempo qui prend le temps du déploiement.

Car même dans les parties plus dures, comme sur “Erosion”, qui donnent au guitariste l’occasion de construire des architectures sophistiquées traversées de phrasés brûlants, le trio porte son attention sur l’amplitude du geste et la nécessité de faire advenir l’événement au moment le plus propice. Ni devant, ni oublié derrière, la frappe sèche du batteur, tour à tour rythmique ou coloriste, distribue les cartes et accompagne, voire appelle, une dynamique aussi fructueuse que changeante.