Chronique

Rob Brown

Oceanic

Rob Brown (as)

Label / Distribution : Rogue Art

Océan, source de la mythologie grecque qui représente un vieillard déversant, de l’urne qu’il tient à la main, les fleuves, les fontaines et la mer. L’image sied parfaitement à Rob Brown qui, avec Oceanic, invite à une méditation autour de cette source vitale.

En digne successeur d’Anthony Braxton qui en 1969 innovait avec For Alto, premier disque en solo au saxophone alto dédié à Cecil Taylor et John Cage, Rob Brown se met lui aussi à nu. Les quatre pièces qui composent la suite « Oversea Undersea » précèdent quatre autres compositions dédiées à la vie maritime et à la navigation. La thématique qui irrigue l’album comporte d’heureux contrastes, Rob Brown rebondit dans des phases musicales verticales sans jamais négliger l’importance des textures sonores. Le saxophoniste affirme sa maîtrise de l’improvisation.

Le son est le premier vecteur de ce voyage que nous propose Rob Brown, ni trop incisif, ni velouté. L’artiste réussit à trouver cet équilibre qui offre une lisibilité à l’auditeur ; la carte de visite d’« Oversea Undersea, part 1 » témoigne d’une maturité qui vise à ne surtout pas se précipiter.
Il s’agit de construire un conte, accolé aux trois autres pièces, qui doit permettre d’aboutir à l’inventaire de phrasés où le rythme se fond avec l’aspect mélodique. La gageure de cet acte soliste se construit ici méthodiquement.
Ce rituel que Rob Brown s’est imposé pour cette suite se manifeste par des questionnements qui annoncent des superpositions mélodiques. L’alto se prête particulièrement bien à cet exercice.

Les glissandos d’« Adrift » permettent de s’imprégner de l’urgence de la déclamation : on entend errer, aux confins des paysages de ce musicien américain, les stridences de Jimmy Lyons et Daunik Lazro.

Habité par les concentrations de microplastiques qui impactent négativement la vie marine, l’océan se voit réhabilité par les fulgurances instrumentales de Rob Brown qui force le respect par cette performance en solo.

par Mario Borroni // Publié le 21 janvier 2024
P.-S. :