Scènes

Stéphane Kerecki Trio + Tony Malaby live au New Morning

Le 11 mai 2009 au New Morning, le trio défendait sur scène Houria, son dernier-né. Un concert sage, mais une musique intense. Tony Malaby et l’une des toutes meilleures formations françaises du moment : voilà qui promettait un concert d’excellente tenue. Pas de surprise majeure, mais l’assurance renouvelée qu’il faut dorénavant compter avec Stéphane Kerecki.


Tony Malaby et l’une des toutes meilleures formations françaises du moment : voilà qui promettait un concert d’excellente tenue. Pas de surprise majeure, mais l’assurance renouvelée qu’il faut dorénavant compter avec Stéphane Kerecki.

Avec quelle impatience on attendait ce concert ! Primo, la présence de Tony Malaby avec le trio de Stéphane Kerecki donne à cette date au New Morning (ainsi qu’à toutes celles qui suivent) des allures de mini-événement. D’autre part, Houria, le disque que défend cette jeune équipe [1], est si beau qu’on ne saurait laisser passer l’occasion de découvrir cette formation sur scène à un moment charnière de son histoire, correspondant à un saut qualitatif majeur.

S. Kerecki © P. Audoux/Vues sur Scènes

Les titres sont tirés le plus souvent de Houria. On entendra ainsi « Macadam », « Un ange passe », « Suite for Tony » (dédié à Tony Malaby), le sublime « A l’air libre » et son mariage délié de saxophones ténor et soprano, « Satellisé », « Secret d’oreille » et la très belle relecture d’« O Sacrum Convivium » d’Olivier Messiaen. Ajoutons à cela quelques titres de Focus Dance et de Story Tellers et voilà deux sets rondement menés. La musique est, comme sur disque, empreinte d’élégance, d’un lyrisme mat et racé ; l’écoute et le respect mutuel entre instrumentistes est évident, leur plaisir manifeste.

T. Malaby © P. Audoux/Vues sur Scènes

Avec ses faux airs de Ian Curtis, Kerecki ne cultive pas la virtuosité mais la puissance et l’aisance : il mène son trio devenu quartet d’une main sûre et phrase sans effort. Il s’efface souvent devant Matthieu Donarier ou Tony Malaby, auxquels il laisse le soin d’exposer les thèmes, et laisse les plus longs chorus à Thomas Grimonprez, qui s’en donne à cœur joie. Exlosion d’énergie au sein d’un groupe habituellement sage et concentré, dont les dernières compositions privilégient l’introspection, la contemplation. Comme sur disque, Malaby et Donarier forment un binôme hors pair qui mêle un son puissant pour l’Américain et un phrasé tout en déliés pour le Français. Tous deux pratiquent tous les types de combinaisons possibles entre soprano et ténor, ajoutant une richesses et une diversité de couleurs bienvenues à la palettre du trio sans que l’homogénéité de celui dernier n souffre. On s’efface dans le jeu collectif, et même la présence massive de Malaby se fait discrète. Certes, la musique est un peu trop proche du disque. Mais ce regret a peu de poids tant son intensité est d’une espèce rare. Stéphane Kerecki trace discrètement son chemin, à la fois modeste et marqué d’un style déjà très personnel. À suivre de près : cette formation a de passionnantes aventures devant elle.

par Mathias Kusnierz // Publié le 6 juin 2009

[1Thomas Grimonprez à la batterie, Stéphane Kerecki à la contrebasse, Tony Malaby et Matthieu Donarier aux saxophones ténor et soprano.