Chronique

Synestet

Rôles

Hélène Duret (cl, bcl), Sylvain Debaisieux (ts), Benjamin Sauzereau (g), Fil Caporali (b), Maxime Rouayroux (dms)

Label / Distribution : Igloo

Rôles est le deuxième album du quintet Synestet de la clarinettiste Hélène Duret. Musicienne présente sur les scènes françaises et belges où on peut aussi l’entendre avec son trio Fur et le groupe Jazz-Migrationné [1] Suzanne, elle vient tout récemment d’intégrer les rangs fortement testostéronés du Tricollectif. Cette appétence pour le collectif, on peut d’ailleurs la pressentir par le positionnement décentré et la petite taille de police de caractère de son nom sur la pochette de l’album, par rapport à celui du quintet.

Ce qui marque d’emblée à l’écoute du disque, c’est le talent de la compositrice-arrangeuse pour faire paraître son orchestre plus gros qu’il ne l’est. Duret et Debaisieux ne pratiquent que rarement (voire jamais) l’unisson. Leurs voix s’entremêlent savamment, complémentaires, sans hiérarchie, aussi belles l’une que l’autre. Les exposés des thèmes semblent être joués davantage par un seul instrument à vent biphonique [2] que par une clarinette et un saxophone. L’imposante et très recherchée palette sonore de la guitare de Benjamin Sauzereau contribue aussi à cette impression de profusion orchestrale.
Quand l’unisson se fait rare, c’est l’harmonie qui en bénéficie [3]. Duret la travaille avec sophistication et excelle quand elle lui donne des atours de simplicité (« Reine sous terre », « Expliquer l’inexplicable »).

Autre signe distinctif de l’album : les pièces sont toutes courtes (de 1’34 à 5’52). Elles sont efficaces, mais – on ne peut pas tout avoir – ne laissent que peu de temps aux improvisateurs pour développer un vrai discours, des prises de paroles individuelles qui débordent, des pertes de contrôle, de la sueur, du sang, des larmes. Il faudra donc aller voir Synestet sur scène pour prendre la pleine mesure de cet ensemble prometteur.

par Hélène Gant // Publié le 4 septembre 2022
P.-S. :

[1Pardon pour le néologisme.

[2Pardon pour le néologisme.

[3Pardon pour le truisme.