Chronique

Eve Beuvens

Heptatomic

Eve Beuvens (p), Laurent Blondiau (tp), Grégoire Tirtiaux (s), Sylvain Debaisieux (s), Benjamin Sauzereau (g), Manolo Cabras (b), Lionel Beuvens (dm)

Label / Distribution : Igloo

Découverte à l’occasion d’un disque sorti en 2009 (chez Igloo déjà) dans lequel elle laissait entendre un jeu fluide et personnel au côté notamment du clarinettiste Joachim Badenhorst, la pianiste belge Eve Beuvens organise, à l’occasion du Gaume Jazz Festival, cet Heptatomic dont elle propose aujourd’hui une version enregistrée. Articulée autour de titres signés de sa main, cette formation est l’occasion de donner une plus grande amplitude à son univers sans rien perdre de sa sensibilité.

Avec beaucoup de soin, en effet, elle tisse des compositions aux atours élégants qui oscillent entre des parties orchestrales classiques aux couleurs chaudes et des textures plus actuelles lascives et hypnotiques. En cela, la participation du guitariste Benjamin Sauzereau permet, avec un sens certain du raffinement, d’infléchir l’ensemble en l’orientant vers des territoires plus actuels.

La pianiste invite à des ambiances en demi-teintes. Non par manque de personnalité mais plutôt par volonté de laisser l’auditeur pénétrer son monde en douceur. Sans se départir d’un lyrisme consubstantiel à sa personnalité, elle aborde également des contrées plus escarpées ou abstraites à l’intérieur de formes parfaitement maîtrisées. Les climats évoqués suivent un cheminement aussi attendu qu’agréable avec suffisamment de liberté néanmoins pour que chacun ait le loisir de s’exprimer pleinement.

Véritable lieutenant et meneur de troupe, le trompettiste Laurent Blondiau fait valoir tout son savoir et sa sensibilité pour dynamiser l’ensemble avec naturel et donner le tonus nécessaire à ce genre de formation élargie. Les saxophones de Grégoire Tirtiaux et Sylvain Debaisieux ne s’y trompent d’ailleurs pas, exposant des solos généreux lorsque les projecteurs pointent sur eux, soutenus par la contrebasse puissante de Manolo Cabras qui impose un balancement aussi imperturbable qu’indispensable. Tous se mettent au service de l’ensemble qu’ils honorent individuellement pour construire une sonorité commune (finesse de jeu du batteur Lionel Beuvens) douce quoique solide. La pianiste, avec retenue, impose sa patte, particulièrement sur la partie basse du piano qu’elle travaille avec sensualité et poésie.