Chronique

Jason Nazary

Spring Collection

Jason Nazary (dms, perc, elec, cla) + Guests : David Leon (fl), Ramon Landolt (cla), Jaimie Branch (tp, cla), Matt Mitchell (cla), Michael Coleman (cla), Grey McMurray (g, voc)

Label / Distribution : We Jazz Records

La collection de printemps que nous présente Jason Nazary est celle de l’année 2020. Un printemps funeste qu’il a vécu confiné avec sa famille dans un espace restreint, comme beaucoup d’autres sur la planète. À la différence d’une majorité d’entre nous, il ne l’a pas mis à profit pour épuiser le catalogue Netflix ou acheter une machine à pain sur amazon mais pour pratiquer son art, face à lui-même.

Si Spring Collection s’ouvre et se ferme sur deux morceaux qui poussent à dodeliner du bonnet (les titres sont d’ailleurs explicites : « An Easy Slide On » et « Goodnight Moss »), le reste de l’album s’éloigne du beat et se tourne délibérément vers le registre de la musique improvisée. Malgré tout, par l’omniprésence de ses outils et de ses instruments, la musique électronique ne se perd jamais d’oreille. Le voyage est exigeant (ce n’est pas une musique d’ambiance, on ne peut pas pétrir son pain pendant l’écoute) mais passionnant. Les titres sont courts et se succèdent sans aucune latence, aucun moment creux, les virages sont toujours surprenants et l’on devine un vrai travail de composition lors du montage.

Quelques invités, enregistrés en distanciel, apparaissent et disparaissent, enrichissant pour un bref instant la palette sonore de Nazary. Parmi eux, la très hype Jaimie Branch avec qui le batteur new-yorkais joue depuis de nombreuses années en duo (Anteloper). Mais ne nous y trompons pas, Spring Collection reste un album solo.
Jason Nazary définit sa démarche comme visant à explorer les liens entre les sons acoustiques et électroniques. Avec ce disque, il la prolonge bien au-delà. Il bâtit une passerelle entre deux mondes qui se regardent en chiens de faïence, voire qui s’ignorent : les terres arides et anarchiques de la musique improvisée dont les chemins sont empruntés par quelques cénobites, et les plages ensoleillées de la musique électronique où se bousculent les sybarites.

par Hélène Gant // Publié le 1er mai 2022
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