TOC
Will Never Play These Songs Again
Jérémie Ternoy (cla, elec), Peter Orins (dms), Ivann Cruz (g)
Label / Distribution : Circum Disc
On les avait laissés dans un méandre du Mississippi à déborder en même temps qu’une fanfare de poche, voici que les trois esprits frappeurs de TOC reviennent pour la quatrième fois [1] depuis 2012 avec un album où les brisures électriques s’amalgament à chaud avec une batterie contondante. You Can Dance, nous invitaient-ils au début, dans une ambiance surchauffée et parfois étouffante. Leur dernier album a un titre moins avenant et pour tout dire définitif : Will Never Play These Songs Again. Est-ce une incitation à tirer le rideau ou, comme le suggère « Lichen », dernier morceau conçu tel un bonus, une célébration de la musique de l’instant, sans filet ni limite ? Sur ce morceau court au regard des deux précédents qui dépassent le quart d’heure, la réponse est claire : dans la rythmique acharnée de Peter Orins comme dans les sons vintage de Jérémie Ternoy, il y a une pulsion de vie qui ne se tarit pas. Elle se faufile même au travers d’une électronique épaisse pour trouver un nouveau souffle.
Dans leur travail de déconstruction de la musique populaire, électrique et synthétique, TOC réussit avec ce court album un tour de force : reprendre des codes, les amalgamer aléatoirement et travailler les transitions pour en faire un tout cohérent qui évoque autant qu’il provoque et laisse dans l’oreille des sensations de produit psychotrope qui oscille entre le planant et le bad trip. Ainsi « The Last Hit » commence dans une électronique psychotrope avant de croiser une batterie saturée qu’on croirait droit sortie d’un riff de Métal. Dans tous les cas, c’est la guitare d’Ivann Cruz qui organise tout, s’impose dans une mécanique de plus en plus complexe avant de vriller dans un déluge à la toute fin du morceau. Ce qui pourrait avoir l’effet d’un jeu de dominos consciencieusement balayé, construit au contraire un nouvel édifice où le piano bass de Ternoy donne à l’ensemble un faux air de dub déglingué.
Lorsque « Ultimate Earworms » advient, comme un second set au match de TOC, on entrevoit un peu plus la volonté du trio. Chaque prise de parole chevauchant l’autre est une phrase répétitive, et lorsqu’elles se mélangent elles offrent des dizaines de possibilités et de perspectives qui ajoutent à l’aspect torride de ce bel album. C’est ainsi qu’au milieu du morceau, on a la sensation d’une course de vitesse entre le Fender et la guitare, mais dans sa version stock-car ; ça frotte et ça culbute, ça fracasse les glissières de sécurité et pourtant ça avance toujours tout droit. On ne peut se résoudre à penser que ces morceaux seront joués pour la dernière fois. En réalité, ils vivent leur vie tranquille au cœur de ce bel album.