Chronique

Barbacana

Barbacana

James Allsopp (ts, b-cl), Sylvain Darrifourcq (dm, toys, objects), Adrien Dennefeld (g, cello), Kit Downes (org, keyboard, prepared p)

Label / Distribution : Babel Label

Le titre éponyme est dû à la plume de Valentin Clastrier, vielleux de grande renommée qu’on est heureux de retrouver ici comme compositeur. Le reste du répertoire est écrit/joué par les instrumentistes qui composent cette formation franco-britannique aux arêtes à la fois acérées et tendres. Acérées parce que rien de ce qui sort de leur fabrique ne manque de pertinence, d’acuité, de modernité aiguë, mais tendres parce que la musique verse plutôt du côté de la sensualité et que, même dans ses moments d’énergie pure, elle prend le temps de se déployer. C’est ce mélange très réussi, et assez rare, qui suscite l’intérêt pour ce disque et incite à le distinguer.

L’orgue de Kit Downes joue une partie souterraine et secrète pleine de réminiscences : on remonterait presque jusqu’à Fats Waller et Count Basie, quand ce dernier tenait l’orgue (pas un Hammond) derrière Paul Quinichette et Eddie Davis. Sylvain Darrifourcq est à la fois le rythmicien implacable qu’on connaît et qu’on aime, mais aussi le joueur, le coloriste, l’enfant, qu’on apprécie tout uniment. Souvent c’est la guitare d’Adrien Dennefeld qui donne à la musique son étonnante et quasi inquiétante dimension paisible, tandis que James Allsopp brode à travers champs et lumières de superbes esquisses mélodiques.

De l’humour énergique et presque « de comptoir » (batteur, barman de bruits...) (« Animation ») on passe à la fine texture en valeurs longues de « Steam », puis à l’étonnant « Adobes » qui me fait penser dans son énoncé à certains morceaux composés pour l’orgue d’église (Louis Vierne), avec comme des effets de registration. Très beau, quoi qu’il en soit. « For No Raisin » prend le temps de sa longue et résistible progression, quand « Migration Big Big Shop » va plutôt vers l’emballement, sans la moindre férocité. Un groupe dont on attend les prestations « live » avec impatience. Programmateurs, à vos calepins.