
David Leon
Bird’s Eye
David Leon (as, ss, fl), DoYeon Kim (gayageum, voc), Lesley Mok (d)
Label / Distribution : Pyroclastic Records
Même si son album Aire de Agua, paru en 2021 chez Out of Your Head Records, a été la porte d’entrée de nombreux observateurs dans la musique du New-Yorkais David Leon, le saxophoniste qui a émaillé sa jeune carrière de collaborations avec Cory Smythe ou Nick Dunston enregistre avec Bird’s Eye le premier fait résolument marquant de sa discographie, en tout cas son œuvre la plus personnelle jusqu’à maintenant. Soutenu par la pianiste Kris Davis qui signait les notes de pochettes d’Aire de Agua, Leon s’entoure dans son nouvel album d’un trio qui fleure bon l’avant-garde de la ville-monde : le travail incroyable de Lesley Mok sur « To Speak in Flowers » en témoigne, et la joueuse de gayageum DoYeon Kim, remarquée dans le Spider Season de Dunston, y ajoute la clé cruciale pour libérer la volonté de Leon de questionner la microtonalité avec beaucoup de poésie.
Dans son texte de présentation, David Leon écrit qu’il apprenait la musique afro-cubaine lorsqu’il a commencé à composer Bird’s Eye, et qu’il faut voir cette œuvre comme un contrepoint à cet apprentissage ; c’est vrai que la teinte d’Extrême-Orient de « A Night for Counting Stars », où Leon est à la flûte, nous emmène loin ; mais quand Kim déclame une poésie coréenne, c’est davantage l’alchimie entre les artistes que l’on perçoit. Il y a une grande écoute entre la joueuse de cithare coréenne et ses compagnons. Mais, de « Ay-Ya » à « Secret Footshake », c’est souvent Lesley Mok qui détermine le climat du morceau en pesant chacun de ses gestes, souvent galvanisé par les directions prises par le saxophone et le gayageum, évoluant souvent en parallèle. Coloriste en chef, Mok est avide de détails et d’éphémère.
Quant à David Leon lui-même, il bouillonne avec ce trio qui souligne la vitalité de cette scène, et de ce qui ressemble à une petite famille new-yorkaise. Dans l’excellent « Infatuation Station », il s’enflamme au soprano sur un pas de deux de ses camarades éprises de liberté. Ce qui frappe ici, c’est la simplicité avec laquelle les musiciens envisagent une musique complexe toujours très incarnée et sensuelle (« Palmetto »). Beaucoup de promesses dans ce disque étonnant.