Chronique

David Virelles

Gnosis

David Virelles (p, vc), Román Díaz (vc, perc), Allison Loggins-Hull (fl, picc), Rane Moore (cl, bcl), Adam Cruz (perc), Alex Lipowski (perc), Matthew Gold (perc), Mauricio Herrera (perc), Thomas Morgan (b), Yunior Lopez (vln), Christine Chen (cello), Samuel DeCaprio (cello), Melvis Santa (voc)

Label / Distribution : ECM

Le pianiste cubain David Virelles, aujourd’hui installé à New York, nous convie avec ce Gnosis à ce qui ressemble beaucoup à une quête mystique. La Gnose ou connaissance suprême, de la divinité, du fond de toute chose et donc de soi-même étant le but ultime de toute mystique, en même temps que le chemin. Mais cette mystique est souvent théurgique, elle use d’outils terrestres pour atteindre le céleste. C’est le cas ici : tambours, chants, elle semble puiser sa force dans les soubassements de la terre, des infra basses qui partent de l’infiniment bas pour trouver l’infiniment haut. Ainsi, les sonorités de Gnosis son tribales ; elles évoquent un culte primitif qu’elles transcendent en art primitif.

Loin de se cantonner à un simple accompagnement, le piano de David Virelles entre en résonance avec la voix et les percussions de Román Díaz, figure marquante de la transmission de l’histoire musicale afro-cubaine. Les musiciens jouent moins ensemble que côte à côte, en fixant la même direction. L’angle d’approche est sensiblement différent : il en ressort une musique qui interpelle, intrigue et parfois dérange. Mais avec cette immense part d’inconnu, d’inexploré qui nous pousse à y revenir, toujours. Au sein de cet espace de liberté où l’on peut à loisir apposer nos impressions, il se peut par moment qu’on se laisse déborder et que la musique nous égare. Arrive sans tarder un instant qui nous raccroche à certains repères, à un lieu identifiable, au cœur de la musique cubaine traditionnelle par exemple, qui nous rattrape de justesse pour ne jamais nous perdre complètement. C’est le prodige de ce disque inqualifiable.

Aux deux opérants s’ajoute le Nosotros Ensemble, d’où cordes, voix, percussions, et bois jaillissent avec parcimonie : il y a tant de place entre chacune de leurs interventions qu’on ne devine pas une seconde que 13 artistes sont à l’œuvre. Beaucoup de nouveauté dans ce disque à la fois contemplatif et festif, qui se laisse appréhender de bien des façons.